-
Laos Episode 2 : Le Sud du Laos entre la N13 et le Mékong
Du 04 au 13 juillet (471 km)
Le matin du troisième jour après la coupure du genou, nous constatons que la plaie est déjà bien cicatrisée. Nous décidons de ne pas perdre plus de temps car il faut que l'on soit à Ventiane, la capitale, un peu avant le 14 juillet, pour accueillir un morceau de notre Berry de départ en France, incarné dans la peau d'Anne, une amie clown.
Le genou bien bandé, nous reprenons la route. La première journée se déroule sous un soleil franc et cuisant. Aucun souci avec le genou blessé. La deuxième journée, le relief est un peu plus marqué et au sommet d'une haute colline, un vent de tempête annonce le déluge. Le soleil a disparu depuis ce matin et nous nous sommes déjà pris une saucée entre deux villages. En vitesse nous nous réfugions dans un resto routier où la famille gérante est aussi souriante et agréable qu'une porte de prison. Le déluge commence. Jusqu'au fond du restaurant pourtant bien abrités nous sommes éclaboussés et le vent nous refroidit. Il nous arrive alors une chose incroyable que nous avions complètement oubliée : la sensation de froid, la chair de poule, les dents qui claquent. Nous sommes gelés. Au bout de 4h00 de pluie diluvienne (heureusement que nous nous sommes arrêtés sur les hauteurs pour ne pas être inondés), nous repartons sous un ciel qui essore ses dernières gouttes. Après 107 km, nous sommes épuisés et toujours trempés. Nous nous précipitons sur le premier et peut-être unique hôtel au bord de la route. Certaines de nos sacoches ont fini par prendre l'eau, notamment les habits et l'appareil photo. Nous ne faisons donc pas les difficiles du moment qu'il y ait un ventilateur pour sécher nos affaires. La chambre est quand même vraiment dégueulasse !!! Tout d'abord il y a les draps tachés qui ont déjà servi à accueillir une ou plusieurs prostituées. Les préservatifs séchés témoignent de la dernière utilité de cette chambre. Le pire étant le flot continu d'énormes blattes qui remonte dans la chambre par plusieurs trous dans la salle de bain. Le plus extraordinaire avec ces bestioles, c'est que même écrasées ou explosées à grand coup de sandale de vélo, elles peuvent continuer de vivre des heures voire des jours entiers ! En témoigne cette blatte que nous avions réduite en purée la veille et qui c'était traînée malgré tout sur plus d'un mètre pendant toute la nuit. Au petit matin elle bougeait encore !!! Comment fait-on pour tuer ces bêtes ?
Au petit matin, nous repartons pour une étape théoriquement de moins de 70 km jusqu'à la ville de Savannakhet. En réalité nous faisons 82 kilomètres car les bornes sont complètement fausses dans ce pays. A chaque kilomètre, elles rajoutent entre 20 et 80 mètres, alors au bout du compte ça fait beaucoup. Heureusement que la route vallonnée est agréable. A Savannakhet nous nous reposons deux jours dans cette ville où les belles maisons coloniales sont toutes, plus où moins volontairement, non entretenues. On dirait que les gens souhaitent que ces traces du passé colonial français, s'effacent le plus vite possible. Dans les quartiers plus récents se dressent des maisons de style chinois moderne, en béton affreux, de forme carrée avec des décorations de mauvais goût et du mobilier en bois énorme gaspillant les derniers arbres de la forêt primaire.
Dernier soir à Savannakhet, en nous baladant dans la ville, nous traversons le temple où il semblerait qu'il y ait une fête. Nous ne connaissons pas la raison de cet événement religieux mais nous constatons que beaucoup de fidèles sont venus acheter des petits bouquets de fleurs et de l'encens. Mais surtout, ils sont venus claquer leur argent dans des vieux jeux de hasard où il n'y a pas grand chose à gagner. Jeux de dés, de cartes ou vieux jeux d'adresse en carton fait maison. Tout le monde participe dans la joie et la bonne humeur.
Le 8 juillet 2009, nous faisons ce qui s'appelle, une journée Bruno Saulet. En hommage à notre camarade cycliste avec qui nous avons voyagé de la Roumanie à l'Iran. Pour Bruno, une journée de 141 km serait quelque chose de banal, mais pour nous, c'est un exploit et même un record de distance, surtout que nous avons perdu du temps à jouer à cache-cache avec les orages !!! Il nous faudra une journée complète pour nous en remettre. Dans la ville où nous arrivons, à Thakhet, nous trouvons l'hôtel le moins cher mais aussi le plus crasseux. Nous y passons plusieurs nuits car nous sommes à coté du Khammouane, une région magnifique où des montagnes très découpées et couvertes de forêt, cachent grottes et cascades. Malheureusement pour nous, ce n'est pas la bonne saison pour visiter le coin et toutes nos tentatives d'exploration, en dehors de la route principale, se terminent par des bains de boue.
Le dernier soir dans cet hôtel miteux, en entrant dans notre chambre, nous découvrons un fait anodin mais tout de même étrange. Les petites boulettes de scotch double face que nous avions décollées du mur, pour boucher deux petits trous dans la porte, étaient retombés sur le sol de notre chambre. Craignant d'être observés, nous rebouchons bien vite les trous avec deux morceaux d'autocollant. Dans la soirée, nos regards se portent par hasard sur la porte et QUE VOIT-ON ? Non nous ne rêvons pas !!! Les autocollants bougent, on dirait que quelqu'un les poussent depuis le couloir. Ce que nous n'avons pas encore expliqué, c'est que compte tenu de la chaleur permanente dans ce pays à cette période, nous sommes rarement habillés lorsque nous sommes enfermés dans notre chambre. Donc rapidement et sans faire de bruit nous nous habillons et nous dirigeons vers la porte. BLAMM !!! Nous ouvrons d'un coup sec : personne dans le couloir ! Nous n'avons pourtant pas rêvé, nous les avons bien vus bouger ces autocollants !!!
Cédric : ''Quelques minutes plus tard, un pressentiment me fait dire qu'il vaudrait mieux nous habiller. Sans arrêter de parler comme si de rien était, je me dirige doucement vers la porte et l'ouvre violemment. Le garçon de l'hôtel, pris en flagrant délit, se relève et cherche ses mots: ''Désolé! » Qu'il me dit, « Il faudrait que vous alliez à la réception!'' Puis, un peu conscient que son argument ne tiendrait pas si j'allais voir la réception et leur demandais pourquoi ils veulent me voir, il me demande si nous n'avons pas vu deux jeunes garçons se balader dans le couloir. Je lui réponds que renfermés dans notre chambre, il est difficile de voir dans le couloir, par contre lui, du couloir, peut voir dans notre chambre. Extrêmement en colère, pour ne pas lui taper dessus, je lui claque la porte au nez. En lui promettant qu'il y aurait une explication demain.''
Le matin de bonne heure, nous nous préparons pour repartir et bouclons nos sacoches sur les vélos. Au moment de payer, nous demandons à la jeune réceptionniste où est le garçon de l'hôtel ? Le « fumier », il est parti pour son jour de congé. Refusant de payer l'hôtel nous montrons à la fille les trous dans la porte. Nous la faisons regarder au travers et nous lui expliquons ce qui s'est passé. Elle n'en revient pas et reste très choquée, nous laissant partir sans payer. Ce n'est pas la première fois que nous voyons des petits trous dans les portes ou les murs des hôtels miteux du Laos. A l'avenir, nous serons plus prudents.
Très en retard sur notre programme, nous n'avons plus le temps de rejoindre Ventiane en vélo, même en faisant deux jours de ''Bruno Saulet''. Nous profitons de ce qu'il y ait une station de bus, pour rattraper notre retard. Les vélos installés dans l'allée centrale, nous voilà partis pour Ventiane dans un bus qui roule à 10km/h de moyenne pendant les 10 premiers kilomètres. Puis d'un coup d'un seul, part en flèche, ne pouvant s'arrêter, sous peine de caler le moteur. Les arrêts sont fréquents au début du trajet, mais toujours de courtes durées. Juste le temps pour que le chauffeur et son équipage mangent, puis un autre arrêt pour charger 3 stères de bois dans les soutes et l'allée centrale. Les amortisseurs n'amortissant plus rien, le bus file à toute vitesse vers la capitale avec une réparation du moteur en cours de route, à coups de marteau au travers de la trappe à l'arrière du véhicule. Pendant le voyage, il n'y a qu'un accident mortel entre un 4x4 et un scooter (devinez qui est mort ?) qui fait ralentir notre chauffeur.
Enfin, dans l'après-midi, nous sommes à Ventiane. Nous y sommes même en avance pour préparer l'arrivée de notre amie Anne. Il faut notamment qu'on lui trouve un vélo pour qu'elle puisse nous accompagner dans le Nord du pays. Cette tâche s'avère assez difficile car même si le Laos est soit disant un pays pauvre économiquement, se déplacer en vélo est devenu trop fatigant et carrément ringard. On trouve par contre sans difficulté, des revendeurs de petites motos. Ahhh ! Se déplacer en moto, devenir obèse, polluer l'air, faire du bruit, être dangereux et être en danger, mourir de maladies liées à l'immobilisme du corps et à la pollution si on ne meurt pas d'accident de la route... Ca, c'est la vraie classe !!! Reste à savoir combien de temps la planète va pouvoir supporter le bruit des moteurs et leur pot d'échappement.
« Laos Episode 1 : Premiers kilomètres, toujours le long du Mékong.Laos Episode 3 : La route à Trois de Ventiane à Louang Prabang »
-
Commentaires