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Du dimanche 12 au mardi 21 octobre
Qeshm : île en forme de flèche à l'entrée du golf persique. Longue de 130km et d'une largeur maximum de 30 km, il y fait toujours très chaud avec des températures annuelles moyennes comprises entre 22 et 32°C et un maximum de 50°C l'été. Il pleut théoriquement en moyenne 150 mm d'eau par an, sauf qu'en certains endroits de l'île cela fait plusieurs années qu'il n'y a plus eu de pluie et une importante couche de poussière recouvre les arbres qui crèvent par centaines. Avec des sites géologiques étonnants, d'importants sites de pontes pour les tortues marines, des colonies de coraux, de poissons et d'oiseaux, des sources de sel et de souffre, des grottes dans le sel et surtout une mangrove unique au monde, Qeshm est un site extrêmement important à préserver.Notre séjour sur l'île restera jusqu'à ce jour, le meilleur moment du voyage. Nous avons rencontré des gens formidables et nous avons pu découvrir une nature extraordinaire. Ahmad et Elham nos amis Espérantistes ont toujours veillé à ce que l'on ne manque de rien. Abou, l'ami professeur de physique, nous a carrément prêté son appartement. Un autre ami natif de l'ile, Hadi, connaît les lieux comme sa poche. Il nous a guidé et appris beaucoup sur la nature et l'histoire de Qeshm. Il y a aussi Reza, élève de Ahmad, il nous a conduit jusqu'au bout de l'ile. Pendant ces dix jours, le plus difficile a sans doute été la chaleur. Une chaleur moite étouffante et jamais de repos ! L'avantage du désert dans le centre de l'Iran, c'est que les nuits sont très fraîches. Cela nous permettait de reposer notre organisme et de pouvoir pédaler le matin dans des conditions optimums. Mais ici il n'y a jamais de repos, l'humidité et la chaleur sont présentes 24h/24 jours et nuits. Pour la première fois de notre vie, le climat des pièces climatisées nous paraît plus normal qu'au dehors. Au début, ça nous a fait très bizarre d'ouvrir la porte de l'appartement et de prendre une grosse bouffée de chaleur, comme si dehors, quelqu'un avait oublié d'éteindre le chauffage. Il faut dire qu'en ville, il fait toujours plus chaud qu'ailleurs. Les climatiseurs qui font frais dedans mais rejettent de l'air très chaud dehors, le trafic incessant et tous ces moteurs ultra-chauds contribuent largement à réchauffer l'atmosphère des villes.
Pour avoir de l'eau, on essaye de dessaler l'eau de mer, malheureusement soit le procéder n'est pas bon, soit l'industrie est obsolète, mais l'eau du robinet est quand même salée et de gros amas de sel et de rouille se forment autour des joints de la tuyauterie.
Avec Ahmad et Elham, nous partons une journée à la découverte de l'île. Nous découvrons les oeuvres magnifiques que Dame nature a réalisée grâce à l'eau, au vent et au temps. L'érosion sur les différentes roches à fini par donner des formes étranges, des monuments et des grottes furent reconverties un temps en habitations troglodytes. En nous promenant à proximité d'un village, nous manquons plusieurs fois de tomber dans des trous très profonds. Ce sont en fait des puits creusés les uns à coté des autres. On pourrait croire que des fous ont creusé partout à la recherche d'une nappe phréatique à seulement 20 ou 30 mètres de profondeur. En fait ces trous sont bel et bien des puits, sauf que l'eau qui est censée les alimenter provient du ciel. Situé dans un fond, le terrain autour forme un entonnoir, ces puits collectaient et stockaient autrefois l'eau des rares pluies. Maintenant ils sont quasiment tous secs de chez sec. il faut dire qu'il pleut de moins en moins sur l'île de Qeshm.
Nous avons ensuite atteint le but de la journée : la mangrove ! L'infrastructure touristique est encore très peu développée ce qui est une chance pour la mangrove. Nous avons calculé notre coup afin d'arriver à marée haute pour aller voir de près cette forêt maritime. Un guide nous a emmené dans une petite embarcation à la découverte de cet écosystème d'une richesse phénoménale. Les racines de ces arbres servent de garde-manger, nourricière et refuge pour de nombreuses espèces de poissons. Les oiseaux sont également présents en quantité et en variété. Soudain, en plein dans la mangrove, derrière un arbre : un dromadaire ! puis un deuxième, un troisième, une dizaine, une vingtaine !!! Mais que font-il là ? dans l'eau ? l'explication est simple, la nourriture étant très peu abondante dans le désert, les éleveurs de dromadaires vont cueillir depuis longtemps du feuillage verdoyant des arbres de la mangrove. Mais pour avoir des feuilles on ne peut plus fraîches, ces sympathiques bestiaux ont fini par apprendre à nager jusqu'aux arbres. Voir des dromadaires dans la mer, c'est marrant et peu commun, toutefois, ils exercent une pression non négligeable sur la mangrove en broutant de jeunes arbres, en essayant de se percher dessus, mais aussi en consommant les oeufs des oiseaux. Il faudra que les autochtones se méfient de ce divertissement pour touristes et limitent l'accès en masse des dromadaires (et des touristes) dans la mangrove.
Sur le chemin du retour, nous nous sommes arrêtés sur un chantier de construction de ''Lenge'', de grands bateaux traditionnels en bois. Pénétrant dans la coque du bateau pas le mince trou prévu pour l'hélice, les ouvriers nous ont fait visiter leur chef d'oeuvre.
Deux jours plus tard, nous retournons explorer le fin fond de l'ile avec Reza. Sur une plage loin de tout, nous surprenons des contrebandiers venant de Dubaï. Ils déchargent plein de grosses caisses d'un tout petit bateau et les installent dans deux gros 4x4. Ils sont au moins 15 à travailler à toute vitesse. L'un deux reste sur le bord du chemin pour faire le guet. Nous avons du mal à croire qu'ils viennent des Emirats Arabes Unis avec leur petite embarcation de 7 mètres en alu à coque plate. Pourtant sur le trajet vers DubaÏ, nous avons croisé toute une flotte de ces petits bateaux navigants à vitesse maximale vers l'île.
Lors d'une pause sur une plage qui est aussi un site de ponte pour les tortues marines, nous avons assisté à un spectacle absolument abominable. Des dizaines de milliers de poissons échoués sur le sable et autant d'autres cadavres que les vagues ramènent. Sur cette route de sable qui longe le littoral, nous contemplons ce désastre sur des kilomètres et des kilomètres. Quelques jours plus tard, nous rencontrons 2 scientifiques qui travaillent pour le Géoparc de Qeshm. Contrairement à ce que nous avions imaginé être à l'origine de ce désastre, à savoir une pollution chimique émanant d'une industrie, d'un bateau ou d'une plateforme pétrolière des Emirats Arabes, les deux scientifiques nous apportent une réponse mille fois plus inquiétante !!! Les principaux responsables ce sont nous les occidentaux, les 20% de la population mondiale qui consommons 80% des ressources de la planète. Nous les principaux responsables producteurs de gaz à effet de serre. Car c'est ça le problème ici ! Les changements climatiques ont provoqué le réchauffement d'un petit degré de l'eau de la mer, ce qui a suffit pour qu'une algue toxique se développe en masse et intoxique les poissons et accessoirement les oiseaux prédateurs.
Après cette macabre découverte, nous avons continué notre chemin à pied et traversé un lac salé à la recherche de la source. Au pied de la montagne de sel, après l'escalade de quelques blocs, nous avons trouvé l'entrée d'une cavité. Le temps que nos yeux s'habituent à l'obscurité et progressivement, la beauté des lieux apparaît et nous fait oublier la chaleur moite extrême qui règne à l'intérieur de la grotte. Les couleurs et les formes sont magnifiques, du rouge au brun au blanc avec les cristaux de sels qui brillent dans l'obscurité.
Pour finir notre séjour sur l'île, nous avons passé plus de temps avec nos amis et notamment Hadi et sa famille avec qui nous avons vraiment créé des liens. Il faut dire que nous avons des points communs et notamment la musique. Avec un frère luthier, une soeur violoniste et une autre professeur de guitare, autant dire que nous avons passé du temps, les instruments entre les mains à jouer et à improviser sur du rock ou du flamenco.
Le jour du premier départ à été émouvant, mais pas autant que le deuxième. Pour être plus clair, au moment de prendre le bateau, les gens du port nous ont expliqué qu'il n'y aurait rien ce dimanche matin. Pour plus d'explications, merci de contacter l'agence qui vous a vendu les billets. Manque de pot, le gars qui nous avait vendu les billets n'était pas des plus sympathiques. Nous sommes donc retourné dans l'agence voir notre copain qui nous avait vendu des billets le double du prix pour la simple raison que nous sommes étrangers et que le gouvernement pour qui il travaille, encourage ce genre de discrimination. Pour rappel, son collègue nous avait proposé un billet au tarif normal (soit 45 euros), mais lui s'est senti en droit de revenir sur ce prix pour exiger un billet à pas moins de 85 euros. Maintenant que nos vélos sont posés sur sa vitrine et que nous demandons des explications sur l'absence du bateau ce matin ? il nous répond qu'il n'en sait rien mais que nous pouvons toujours retourner sur le continent prendre un autre bateau ou encore mieux, nous pouvons décoller dans la journée depuis l'île. Malheureusement pour nous, il ne peut pas rembourser nos 200 dollars et nous devrons acheter en plus les autres billets. Pendant pas moins d'une heure trente, nous l'avons harcelé pour qu'il rembourse nos billets, qu'il contacte le capitaine, ou bien qu'il nous fasse une réduction de 50% sur nos billets (soit le tarif normal). Rien à faire, il n'a jamais voulu rembourser ou dédommager de quoi que ce soit, mais il a fini par nous faire deux nouveaux billets pour un autre bateau mardi matin et il nous a offert une nuit d'hôtel dont nous n'avons pas bénéficié car nous sommes retournés chez nos amis.
Quelque part, cette mésaventure nous aura permis d'assister au tout premier cours d'Espéranto sur l'ile de Qeshm et de visiter une école.
Lorsque nous étions en balade avec Ahmad et Elham, nous parlions tout le temps en Espéranto et les gens étaient souvent interpellés par ce langage qu'ils ne reconnaissaient pas vraiment. Aussitôt, nous en profitions pour faire la promotion de cette langue universelle et les gens toujours très réceptifs prenaient le contact d'Ahmad. Finalement, en dix jours, une quinzaine de personnes se sont intéressées à l'Espéranto. La veille du nouveau départ, Ahmad a décidé de convoquer toutes les personnes intéressées pour un premier cours. Bien que ne parlant pas un Espéranto très élaboré, nous avons quand même pu expliquer le fonctionnement de cette langue par le biais d'exemples et de jeux improvisés.
Mardi matin. Cette fois ci, c'est le vrai départ, Hadi nous accompagne jusqu'au dernier poste de contrôle. Il était vraiment temps pour nous de partir car nous commencions à ne vraiment plus supporter les incessants contrôles de police. Avant l'embarquement, nos passeports ont bien été contrôlés une quinzaine de fois, notamment par un policier qui, quelques jours avant, habillé en civil avait bêtement questionné Hadi sur lui et nous, savoir qui nous étions, d'où nous venions, pourquoi sommes nous ici, que fait-il avec nous ??? Bref, ce gouvernement complètement paranoïaque avec des policiers en surnombre traquant des espions étrangers ou des ennemis de l'état, ne nous manquera pas. Tout ceci est bien dommage car ce sont eux qui détériorent le plus l'image du pays. Si en France, avant le départ pour ce voyage, tout le monde nous disait de faire attention en Iran car ils considéraient que c'est un pays dangereux, c'est sûrement à cause du gouvernement et des médias. Mais la vérité est que nous ne nous sommes jamais sentis autant en sécurité qu'en Iran, les gens ont été d'une gentillesse extraordinaire, toujours là pour nous aider, nous guider, nous accueillir et nous protéger. Nous avons rencontré dans ce pays des gens que nous n'oublierons jamais et tout ce que l'on peut leur souhaiter c'est plus de liberté !
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Mercredi 08 octobre (70 kms)
En route pour Bandar-e Abbas. nous quittons l'hôtel en promettant de garder le contact avec Ali et de lui chercher de l'aide pour démarrer l'agriculture biologique en Iran. Sur la route, la chaleur vient vite. Ali nous a donner deux adresses pour passer la nuit. La première à 70 kilomètres de Yazd, c'est un caravan sarail restauré et reconverti en hôtel de luxe pour touristes (il nous prévient que pour nous, ce sera un peu cher). La deuxième option, c'est à 95 kilomètres de Yazd, un autre caravan Sarail pour Iraniens. Gratuit l'ambiance y sera sans aucun doute plus conviviale.Peu avant midi, nous commençons à avoir très très chaud et nous arrivons juste au caravan sarail de luxe. Nous décidons de nous y arrêter et de demander à passer la nuit avec les chameaux s'il faut, pour ne pas payer le prix pour touristes. Vu d'extérieur, le caravan sarail ressemble à une forteresse sans vie. De grandes tours, un mur sans la moindre fenêtre, une seule et unique grande porte au Sud. Un autre corps de bâtiment moins bien restauré, reçoit les dromadaires.
Au bout d'un quart d'heure, un monsieur vient nous ouvrir. Il nous fait entrer dans la forteresse. Nous posons les vélos et en traversant les lieux pour aller boire un thé, nous découvrons un site historique magnifique. Plus tard dans la soirée, une Iranienne nous expliquera que ce caravan sarail fut une petite fantaisie du Shaah Abbas qui avait souhaité que l'ouvrage soit de forme circulaire. Pour passer une nuit dans ces lieux, il nous aura fallu négocier vivement au téléphone avec le patron. Impossible de lui faire baisser le prix à moins de 30 euros (au lieu de 50). Nous lui avons expliqué que nous étions à vélo, que nous avions de la nourriture, que nous pouvions dormir sur le toit et que quelques litres d'eau et un peu d'ombre pendant la journée nous suffiraient. Nous avons même proposé nos services, mais rien à faire. Le gérant tient à son image de marque et souhaite que nous soyons ses hôtes. En plus il aime beaucoup les cyclistes et ce serait un honneur pour lui que de nous avoir à dormir. Nous avons donc pris une chambre et pour 15 euros par personne nous avons pu dormir et manger deux repas absolument délicieux préparés par des cuisiniers venus du Balouchistan.
Jeudi 09 octobre (90 kms)
La nuit à été courte et les touristes espagnoles ont fait la fiesta jusqu'à très tard. C'est donc la « tête dans le pâté » qu'au petit matin, nous nous recouchons sur les vélos. Le midi, nous nous arrêtons à 5 km de la ville étape « Anar » où nous devons trouver un caravan sarail, un parc où une mosquée pour passer la nuit.A l'ombre fraîche d'une mosquée pour camionneurs, nous nous installons pour manger et faire la très sainte sieste. Tous les chauffeurs sans exception laissent tourner le moteur de leur véhicule. Qu'ils fassent la sieste, mangent, aillent aux toilettes ou à la mosquée, qu'importe, ils brûlent du pétrole !!! Rien que pour rire, nous avons observé l'un de ces camionneurs. Arrivé à 12h05, il commence par aller aux toilettes où il profite des lavabos pour laver son linge. Ensuite il va prier un peu à la mosquée. Quand il ressort, il va acheter quelques bricoles à manger, discute avec le commerçant qui lui parle de nos vélos. Il nous fixe du regard quelques minutes essayant de comprendre comment fonctionnent ces drôles d'engins et savoir si nous sommes bien des humains pour monter la dessus. Ensuite il va manger son pain et sa boite de thon, retourne à un robinet extérieur pour se laver les mains, va remplir son bidon d'eau, remonte dans son camion, se repose 5 minutes et ça y est, il repart. Il est 13h30. Au total donc, son camion sera resté allumé 1h25 minutes pour le simple plaisir de brûler du pétrole et de polluer l'air. Quand on leur demande pourquoi n'éteignent-ils pas leur camion, le seul argument, c'est qu'ils gagnent du temps au démarrage car ils n'ont pas à faire chauffer le moteur (c'est vrai qu'en plein désert avec 35 à 40 degrés au soleil, les moteurs ne doivent pas chauffer bien vite). Quand bien même cet argument serait valable, rien ne les empêcherait de commencer à rouler doucement sans forcer le moteur en attendant que ce dernier « chauffe », mais c'est vrai que nous sommes en Iran et qu'ici la conduite c'est toujours pied au plancher, à fond à fond à fond !!!
Après une sieste interrompue à plusieurs reprises à cause des gaz d'échappements qui rendent l'air irrespirable nous avons repris la route pour trouver un endroit correct pour passer la nuit. Arrivé à Anar, nous demandons à un hôtel s'il est possible de passer la nuit dans le jardin (ou plutôt le parking). Pas de négociation possible le gérant veut nous faire payer une chambre. A peine reparti à la recherche de la mosquée, un automobiliste nous arrête. Il se nomme Ghasm et est aussi cycliste. Après notre aventure à Na'in, nous nous méfions mais nous le suivons quand même jusque chez lui. Vue d'extérieur, sa maison ne paye pas de mine, c'est un simple bloc de béton et de briques comme les autres. A l'intérieur par contre, c'est très beau et très luxueux. Comme toutes les maisons iraniennes, le salon est très grand avec de beaux tapis, il n'y a pas de meubles et très peu de décorations au mur. Ghasm à deux grands salons dans sa maison, un pour les hommes et un autres pour les femmes. Il nous montre de nombreux albums photos de ses traversées de l'Iran à Vélo et de ses rencontres avec d'autres cyclistes étrangers. Dans la vie, Ghasm est percepteur des impôts, mais comme beaucoup d'Iraniens que nous avons rencontrés, pour avoir un revenu plus convenable, il tient en plus de son travail, une boutique. C'est donc le premier percepteur réparateur de frigo que nous rencontrons. Il est très content de nous rencontrer et nous demande déjà de revenir après le voyage. Nous sommes tellement fatigués et il est tellement bavard que lorsqu'il nous montre les tapis du salon, nous nous écroulons dessus et nous endormons instantanément la bouche ouverte.
Vendredi 10 octobre (63km)
Ghasm nous emmène faire un petit tour dans sa ville. Visite de la mosquée, du caravan serail et de sa boutique. Quand nous lui expliquons que nous allons à Bandar e Abbas à vélo, il nous interdit de reprendre la route. Car après Anar, nous devons passer une route de montagne non seulement difficile et très meurtrière car étroite, avec une circulation dans les deux sens, des tunnels, des camions et des bus à gogo et pas de bande d'arrêt d'urgence pour pédaler tranquille. Lors d'une balade, sans bagages et avec son VTT peugeot, il a pris une portion de cette route. Il ne recommencera jamais. « En plus, nous dit-il, quand vous aurez passé ces montagnes, vous ne pourrez plus pédaler tellement il fait chaud. Là bas, c'est un autre climat ! ». Il nous conseille de prendre le bus à Anar ou de rouler encore une journée jusqu'à Ahmad Abar et de prendre le train. Malgré notre envie de pédaler, nous choisissons l'option train. Grâce à ses relations, nous achetons pour 5 euros, deux billets de train première classe pour Bandar e Abbas. Nous voilà parti pour la fameuse gare ferroviaire d'Ahmad Abar. Comme la plus part des gares en Iran, elle se situe loin de la ville et loin de tout !!! Dans le cas présent, elle est en plein désert, au pied des montagnes. Nous passons le hall : personne ! pas un chat, juste un moineau qui vit des quelques miettes autour des poubelles. Nous avons chaud chaud chaud et nous avons beaucoup de fatigue accumulée. Nous nous endormons quelques temps sur des bancs puis, après avoir mangé un peu et pris une douche dans les toilettes, nous nous recouchons sur un campement improvisé dans un coin du bâtiment. Nous nous reposons un bon moment dans ce lieu où ne circulent à première vue que des fantômes. Vers 16h00, deux vrais humains pénètrent dans la salle. Ils viennent nous poser quelques questions et ne comprennent absolument rien à nos réponses pourtant très clair et bien rodées depuis plus d'un mois dans le pays. Au début, on ne sait pas si ils sont des voyageurs, des fous, ou bien des gens qui travaillent ici. Après analyse, ils sont fous et travaillent dans la gare. Leur boulot doit consister à surveiller les lieux, mais comme il n'y a jamais personne et qui ne se passe jamais rien, ils restent devant la télé à regarder le « Roi Lion » en dessins animés. Peu avant la nuit, c'est à dire vers 17h30 : Nouvelle visite ! 3 hommes ne parlant que Perse, viennent nous prendre en charge. Ils nous demandent nos passeports, nous refusons de les donner. Ils nous demandent nos billets de train, ça d'accord, mais les vélos ont l'air de leur poser problème. Ils n'en ont jamais vu et nous proposent d'aller à Bandar e abbas ou à Teheran en vélo, car selon eux, le vélo, c'est mieux que le train. Ils ont l'air tous les trois complètement fêlés. Les seuls mots d'anglais qu'ils connaissent sont leurs surnoms. L'un d'eux, le petit gros, se fait appeler « Bufalo » ou « Beef », le deuxième avec ses grandes oreilles se fait appeler « Donkey » (l'âne) et le troisième petit nerveux au visage tantôt sévère tantôt ahuri, se fait appeler « the rabbit » (le lapin). Les trois bestiaux sont sympathiques avec nous, même s'ils nous font parfois un peu peur. Ils nous proposent du thé et lorsqu'ils comprennent enfin que nous allons à Bandar e Abbas en train avec nos vélos, ils nous ouvrent une petite salle pour que l'on se repose. Vers minuit, une demie heure avant notre train, nous commençons à nous préparer. Problème : The Rabbit, le chef de gare nous demande en haut de sa tour de contrôle. En haut des escaliers, 3 ou 4 paires de chaussures devant la porte du bureau. Ici on travaille pieds-nus et assis sur un tapis. Le chef de gare ne nous dit pas grand chose, simplement, il s'agite au dessus du plan de la gare. Visiblement, il y a un problème. Les autres bonshommes qui travaillent sur le tapis se creusent la tête et ont l'air très embêtés. Nous les entendons répéter le nom des trains en provenance d'Esfahan et Téhéran. Nous demandons au Rabbit s'il y a eu un problème, un accident ? Il nous répond que tout va bien mais que l'on doit attendre un peu car le train va avoir du retard. Il nous propose de retourner nous coucher, il nous réveillera dans 5 heures. QUOI 5 heures ???
Samedi 11 octobre (15 km)
Au petit matin, nous nous réveillons tout seul car le chef de gare nous a oublié. Il est presque 6h mais par ''chance'', le train n'est pas encore passé. Nous mettons les vélos sur le bord de la voie. Bufalo nous donne un ticket pour récupérer nos vélos à l'arrivée. Le train d'Esfahan arrive mais les gugusses nous interdisent de monter dedans. Nous sommes à bloc ! après une nuit chez ces fous, on a qu'une envie, partir le plus vite possible. Finalement, après une demi heure d'attente, notre train arrive. Nous nous chargeons nous même de mettre les vélos dans le dernier wagon et nous partons enfin pour Bandar e Abbas. Dans notre compartiment, ça sent des pieds. Nous essayons de dormir mais c'est difficile alors nous allons dans le wagon restaurant. On nous offre deux thés et nous discutons avec deux étudiants de Bandar e Abbas sympathiques qui ne mettent absolument pas notre instinct de méfiance en alerte. Ils nous parlent de l'Ile de Qeshm, et de la beauté de la nature que nous trouverons là-bas. Pourtant, entre deux wagons, lorsque nous faisons la queue devant les toilettes, un homme à barbe qui était assis à coté des jeunes vient nous parler et nous demande de ne surtout pas croire ces jeunes, l'Iran peut-être un pays dangereux pour nous, il ne faut faire confiance à personne et surtout nous ne devons pas être héberger par ces jeunes car une fois chez eux, ils pourraient nous agresser et nous voler. Nous décidons donc de lui obéir, c'est à dire que nous ne faisons confiance à personne et surtout pas à ce policier en civil qui s'amuse à nous faire peur et que nous reverrons à la gare de Bandar, discutant avec ces collègues. De retour dans le wagon restaurant, un autre policier, en uniforme celui-ci, vient contrôler nos passeports (ça faisait longtemps...). Nous attendons l'arrivée avec impatience. Dehors, les paysages ont changé et deviennent plus sableux, avec de belles oasis, des palmiers, des troupeaux de chèvres des dromadaires et aussi du n'importe quoi comme ces grands champs de maïs irrigués.Arrivés à la gare de Bandar e Abbas, la chaleur nous assomme littéralement, à peine descendu du train, nous sommes trempés de sueur, nous cherchons l'oxygène dans cette chaleur moite extrême ! Pour récupérer les vélos, c'est très difficile. Tout d'abord, on nous interdit l'accès au wagon, ensuite on nous met dans un hangar où des employés font et défont des paquets sous l'oeil de policiers. Au bout d'une demie heure, notre train s'en va avec nos vélos. Tous les gens d'ici ne parlent QUE farsi et il faut que l'on s'énerve pour qu'ils nous expliquent que le train va revenir. Au bout de 10 minutes un quart d'heure, le train revient. Nous allons décharger nous même nos vélos, mais en voulant partir, on nous arrête car il faut payer. Bien sur que nous allons payer, nous ne sommes pas des voleurs, donc nous sortons la somme inscrite sur le ticket que nous a préparé bufalo la veille. Un bonhomme raye le prix et le multiplie par trois ! Là on commence à ne plus comprendre grand chose. Le train est arrivé avec plus de 6 heures de retard, nous avons encore attendu une heure avant de récupérer nos vélos, nous les avons chargés et déchargés nous même et voilà t'y pas qu'on veut nous faire payer trois fois plus cher ?! Pour le coup, nous refusons de payer cette sommes et tendons l'argent du premier prix. Ils refusent ! quand on demande des explications, ils ne sont pas pressés de répondre. Nous décidons donc de prendre notre temps. Ils ne sont pas pressés ? et bien nous non plus ! On va attendre ici jusqu'à demain s'il faut ! nous avons de quoi manger, dormir... Ils finiront bien par en avoir marre... Nous nous installons par terre et nous commençons à manger. 2 heures plus tard, ils reviennent à la charge et nous demandent de payer. Nous leur tendons toujours la même somme initiale. Finalement, ils rayent le prix et nous font une petite réduction et s'excusent car ils admettent avoir fait une erreur dans leur calcul, mais c'est toujours deux fois plus cher. Alors que nous leur expliquons que nous refusons de payer ce nouveau prix, un homme venu de Téhéran parlant très bien anglais, commence à faire l'interprète. Nous pouvons enfin dire ce que nous avons sur le coeur et finalement, leurs arguments ne tenant pas debout, nous ne paierons que la somme de départ. Ils ont paraît-il un règlement fixant un prix plus élevé pour les objets en aluminium car ils sont plus fragiles que l'acier. Nous leur avons donc montré que nos vélos supportaient beaucoup de poids et que le porte bagage du Nazca était en Acier fabriqué par Maurice Deville à Neuvy St Sepulchre. Du costaud de chez costaud !!!
Au Crépuscule, nous payons enfin le tarif normal et nous pouvons enfin remonter sur nos vélos pour rejoindre la Ville de Bandar e Abbas. Car comme toutes les gares ferrovières d'Iran, celle-ci est à l'extérieur de la ville.
Nous pédalons un bon moment à la recherche d'un hôtel pas cher. Dans une agence de voyage, nous nous faisons rembourser 50% du prix des billets de train (à cause des 6 heures de retard), soit environs 2 euros. A 20h, nous n'avons toujours pas trouvé d'endroit pour dormir. Avant d'aller monter la tente sur la plage, nous essayons de contacter Ahmad et Elham, nos contacts Esperantistes sur l'Ile de Qeshm, pour leur dire que nous sommes arrivés et que nous pourrons les voir demain. Ahmad nous dit qu'il nous attends chez lui ce soir et que nous pouvons prendre un bateau pour rejoindre l'Ile. Les vélos bien accrochés à l'arrière de la vedette, nous quittons le plancher des vaches pendant cinquante minutes. Le bateau va vite et nous sommes vraiment secoués. Parfois nous décollons un peu du siège, un enfant vomi tout son goûter, il fait un froid de canard à cause de la clim, un mec drogué à l'opium dort à coté de nous et enfin, couchée sur des sièges derrière nous, une jeune femme inconsolable pleure toutes les larmes de son corps. Arrivés sur l'ile, Ahmad vient nous retrouver pour nous emmener chez lui.
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Voici les photos de l'Ile de Qeshm.
Profitez-en bien car lors de la sauvegarde des photos, il y a eu un problème sur la carte mémoire de l'appareil photo et nous avons perdu 95% des plus belles photos de l'Ile.
http://picasaweb.google.fr/portraitdeplanete/IranIleDeQeshmGolfPersique #
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