• IRAN EPISODE 8 : CHALEUR TROPICALE SUR L'ILE DE QESHM


    Du dimanche 12 au mardi 21 octobre
    Qeshm : île en forme de flèche à l'entrée du golf persique. Longue de 130km et d'une largeur maximum de 30 km, il y fait toujours très chaud avec des températures annuelles moyennes comprises entre 22 et 32°C et un maximum de 50°C l'été. Il pleut théoriquement en moyenne 150 mm d'eau par an, sauf qu'en certains endroits de l'île cela fait plusieurs années qu'il n'y a plus eu de pluie et une importante couche de poussière recouvre les arbres qui crèvent par centaines. Avec des sites géologiques étonnants, d'importants sites de pontes pour les tortues marines, des colonies de coraux, de poissons et d'oiseaux, des sources de sel et de souffre, des grottes dans le sel et surtout une mangrove unique au monde, Qeshm est un site extrêmement important à préserver.

    Notre séjour sur l'île restera jusqu'à ce jour, le meilleur moment du voyage. Nous avons rencontré des gens formidables et nous avons pu découvrir une nature extraordinaire. Ahmad et Elham nos amis Espérantistes ont toujours veillé à ce que l'on ne manque de rien. Abou, l'ami professeur de physique, nous a carrément prêté son appartement. Un autre ami natif de l'ile, Hadi, connaît les lieux comme sa poche. Il nous a guidé et appris beaucoup sur la nature et l'histoire de Qeshm. Il y a aussi Reza, élève de Ahmad, il nous a conduit jusqu'au bout de l'ile. Pendant ces dix jours, le plus difficile a sans doute été la chaleur. Une chaleur moite étouffante et jamais de repos ! L'avantage du désert dans le centre de l'Iran, c'est que les nuits sont très fraîches. Cela nous permettait de reposer notre organisme et de pouvoir pédaler le matin dans des conditions optimums. Mais ici il n'y a jamais de repos, l'humidité et la chaleur sont présentes 24h/24 jours et nuits. Pour la première fois de notre vie, le climat des pièces climatisées nous paraît plus normal qu'au dehors. Au début, ça nous a fait très bizarre d'ouvrir la porte de l'appartement et de prendre une grosse bouffée de chaleur, comme si dehors, quelqu'un avait oublié d'éteindre le chauffage. Il faut dire qu'en ville, il fait toujours plus chaud qu'ailleurs. Les climatiseurs qui font frais dedans mais rejettent de l'air très chaud dehors, le trafic incessant et tous ces moteurs ultra-chauds contribuent largement à réchauffer l'atmosphère des villes.

    Pour avoir de l'eau, on essaye de dessaler l'eau de mer, malheureusement soit le procéder n'est pas bon, soit l'industrie est obsolète, mais l'eau du robinet est quand même salée et de gros amas de sel et de rouille se forment autour des joints de la tuyauterie.

    Avec Ahmad et Elham, nous partons une journée à la découverte de l'île. Nous découvrons les oeuvres magnifiques que Dame nature a réalisée grâce à l'eau, au vent et au temps. L'érosion sur les différentes roches à fini par donner des formes étranges, des monuments et des grottes furent reconverties un temps en habitations troglodytes. En nous promenant à proximité d'un village, nous manquons plusieurs fois de tomber dans des trous très profonds. Ce sont en fait des puits creusés les uns à coté des autres. On pourrait croire que des fous ont creusé partout à la recherche d'une nappe phréatique à seulement 20 ou 30 mètres de profondeur. En fait ces trous sont bel et bien des puits, sauf que l'eau qui est censée les alimenter provient du ciel. Situé dans un fond, le terrain autour forme un entonnoir, ces puits collectaient et stockaient autrefois l'eau des rares pluies. Maintenant ils sont quasiment tous secs de chez sec. il faut dire qu'il pleut de moins en moins sur l'île de Qeshm.

    Nous avons ensuite atteint le but de la journée : la mangrove ! L'infrastructure touristique est encore très peu développée ce qui est une chance pour la mangrove. Nous avons calculé notre coup afin d'arriver à marée haute pour aller voir de près cette forêt maritime. Un guide nous a emmené dans une petite embarcation à la découverte de cet écosystème d'une richesse phénoménale. Les racines de ces arbres servent de garde-manger, nourricière et refuge pour de nombreuses espèces de poissons. Les oiseaux sont également présents en quantité et en variété. Soudain, en plein dans la mangrove, derrière un arbre : un dromadaire ! puis un deuxième, un troisième, une dizaine, une vingtaine !!! Mais que font-il là ? dans l'eau ? l'explication est simple, la nourriture étant très peu abondante dans le désert, les éleveurs de dromadaires vont cueillir depuis longtemps du feuillage verdoyant des arbres de la mangrove. Mais pour avoir des feuilles on ne peut plus fraîches, ces sympathiques bestiaux ont fini par apprendre à nager jusqu'aux arbres. Voir des dromadaires dans la mer, c'est marrant et peu commun, toutefois, ils exercent une pression non négligeable sur la mangrove en broutant de jeunes arbres, en essayant de se percher dessus, mais aussi en consommant les oeufs des oiseaux. Il faudra que les autochtones se méfient de ce divertissement pour touristes et limitent l'accès en masse des dromadaires (et des touristes) dans la mangrove.

    Sur le chemin du retour, nous nous sommes arrêtés sur un chantier de construction de ''Lenge'', de grands bateaux traditionnels en bois. Pénétrant dans la coque du bateau pas le mince trou prévu pour l'hélice, les ouvriers nous ont fait visiter leur chef d'oeuvre.

    Deux jours plus tard, nous retournons explorer le fin fond de l'ile avec Reza. Sur une plage loin de tout, nous surprenons des contrebandiers venant de Dubaï. Ils déchargent plein de grosses caisses d'un tout petit bateau et les installent dans deux gros 4x4. Ils sont au moins 15 à travailler à toute vitesse. L'un deux reste sur le bord du chemin pour faire le guet. Nous avons du mal à croire qu'ils viennent des Emirats Arabes Unis avec leur petite embarcation de 7 mètres en alu à coque plate. Pourtant sur le trajet vers DubaÏ, nous avons croisé toute une flotte de ces petits bateaux navigants à vitesse maximale vers l'île.

    Lors d'une pause sur une plage qui est aussi un site de ponte pour les tortues marines, nous avons assisté à un spectacle absolument abominable. Des dizaines de milliers de poissons échoués sur le sable et autant d'autres cadavres que les vagues ramènent. Sur cette route de sable qui longe le littoral, nous contemplons ce désastre sur des kilomètres et des kilomètres. Quelques jours plus tard, nous rencontrons 2 scientifiques qui travaillent pour le Géoparc de Qeshm. Contrairement à ce que nous avions imaginé être à l'origine de ce désastre, à savoir une pollution chimique émanant d'une industrie, d'un bateau ou d'une plateforme pétrolière des Emirats Arabes, les deux scientifiques nous apportent une réponse mille fois plus inquiétante !!! Les principaux responsables ce sont nous les occidentaux, les 20% de la population mondiale qui consommons 80% des ressources de la planète. Nous les principaux responsables producteurs de gaz à effet de serre. Car c'est ça le problème ici ! Les changements climatiques ont provoqué le réchauffement d'un petit degré de l'eau de la mer, ce qui a suffit pour qu'une algue toxique se développe en masse et intoxique les poissons et accessoirement les oiseaux prédateurs.

    Après cette macabre découverte, nous avons continué notre chemin à pied et traversé un lac salé à la recherche de la source. Au pied de la montagne de sel, après l'escalade de quelques blocs, nous avons trouvé l'entrée d'une cavité. Le temps que nos yeux s'habituent à l'obscurité et progressivement, la beauté des lieux apparaît et nous fait oublier la chaleur moite extrême qui règne à l'intérieur de la grotte. Les couleurs et les formes sont magnifiques, du rouge au brun au blanc avec les cristaux de sels qui brillent dans l'obscurité.

    Pour finir notre séjour sur l'île, nous avons passé plus de temps avec nos amis et notamment Hadi et sa famille avec qui nous avons vraiment créé des liens. Il faut dire que nous avons des points communs et notamment la musique. Avec un frère luthier, une soeur violoniste et une autre professeur de guitare, autant dire que nous avons passé du temps, les instruments entre les mains à jouer et à improviser sur du rock ou du flamenco.

    Le jour du premier départ à été émouvant, mais pas autant que le deuxième. Pour être plus clair, au moment de prendre le bateau, les gens du port nous ont expliqué qu'il n'y aurait rien ce dimanche matin. Pour plus d'explications, merci de contacter l'agence qui vous a vendu les billets. Manque de pot, le gars qui nous avait vendu les billets n'était pas des plus sympathiques. Nous sommes donc retourné dans l'agence voir notre copain qui nous avait vendu des billets le double du prix pour la simple raison que nous sommes étrangers et que le gouvernement pour qui il travaille, encourage ce genre de discrimination. Pour rappel, son collègue nous avait proposé un billet au tarif normal (soit 45 euros), mais lui s'est senti en droit de revenir sur ce prix pour exiger un billet à pas moins de 85 euros. Maintenant que nos vélos sont posés sur sa vitrine et que nous demandons des explications sur l'absence du bateau ce matin ? il nous répond qu'il n'en sait rien mais que nous pouvons toujours retourner sur le continent prendre un autre bateau ou encore mieux, nous pouvons décoller dans la journée depuis l'île. Malheureusement pour nous, il ne peut pas rembourser nos 200 dollars et nous devrons acheter en plus les autres billets. Pendant pas moins d'une heure trente, nous l'avons harcelé pour qu'il rembourse nos billets, qu'il contacte le capitaine, ou bien qu'il nous fasse une réduction de 50% sur nos billets (soit le tarif normal). Rien à faire, il n'a jamais voulu rembourser ou dédommager de quoi que ce soit, mais il a fini par nous faire deux nouveaux billets pour un autre bateau mardi matin et il nous a offert une nuit d'hôtel dont nous n'avons pas bénéficié car nous sommes retournés chez nos amis.

    Quelque part, cette mésaventure nous aura permis d'assister au tout premier cours d'Espéranto sur l'ile de Qeshm et de visiter une école.

    Lorsque nous étions en balade avec Ahmad et Elham, nous parlions tout le temps en Espéranto et les gens étaient souvent interpellés par ce langage qu'ils ne reconnaissaient pas vraiment. Aussitôt, nous en profitions pour faire la promotion de cette langue universelle et les gens toujours très réceptifs prenaient le contact d'Ahmad. Finalement, en dix jours, une quinzaine de personnes se sont intéressées à l'Espéranto. La veille du nouveau départ, Ahmad a décidé de convoquer toutes les personnes intéressées pour un premier cours. Bien que ne parlant pas un Espéranto très élaboré, nous avons quand même pu expliquer le fonctionnement de cette langue par le biais d'exemples et de jeux improvisés.

    Mardi matin. Cette fois ci, c'est le vrai départ, Hadi nous accompagne jusqu'au dernier poste de contrôle. Il était vraiment temps pour nous de partir car nous commencions à ne vraiment plus supporter les incessants contrôles de police. Avant l'embarquement, nos passeports ont bien été contrôlés une quinzaine de fois, notamment par un policier qui, quelques jours avant, habillé en civil avait bêtement questionné Hadi sur lui et nous, savoir qui nous étions, d'où nous venions, pourquoi sommes nous ici, que fait-il avec nous ??? Bref, ce gouvernement complètement paranoïaque avec des policiers en surnombre traquant des espions étrangers ou des ennemis de l'état, ne nous manquera pas. Tout ceci est bien dommage car ce sont eux qui détériorent le plus l'image du pays. Si en France, avant le départ pour ce voyage, tout le monde nous disait de faire attention en Iran car ils considéraient que c'est un pays dangereux, c'est sûrement à cause du gouvernement et des médias. Mais la vérité est que nous ne nous sommes jamais sentis autant en sécurité qu'en Iran, les gens ont été d'une gentillesse extraordinaire, toujours là pour nous aider, nous guider, nous accueillir et nous protéger. Nous avons rencontré dans ce pays des gens que nous n'oublierons jamais et tout ce que l'on peut leur souhaiter c'est plus de liberté !


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