• Du 8 au 15 mai(376 km)

    A force de respirer la fumée au milieu de tous ces camions, nous avons très mal à la gorge et un drôle de goût dans la bouche. Dans le ferry qui nous emmène à George Town, sur l'ile de Penang, nous sommes les deux seules personnes se déplaçant sur des véhicules non motorisés. Autour de nous des centaines de motos prennent le bateau.

    Cédric : ''Nous sommes serrés comme des sardines, je me brûle la jambe sur un pot d'échappement.''

    Descendus, du ferry, nous filons « de suite » à l'ambassade thaïlandaise. Manque de bol, elle est fermée exceptionnellement aujourd'hui vendredi, c'est l'anniversaire du Bouddha. Revenez lundi !

    Nous avons tout le week end pour nous reposer et visiter l'île. Nous allons dans le quartier indien. L'odeur de la cuisine et des encens, les gens et le bruit, tout cela nous rappelle effectivement l'Inde, à ce détail près, c'est qu'ici, c'est beaucoup plus propre et qu'il n'y a pas de vache dans les rues. Pour nous changer les idées et nous faire plaisir, nous allons au cinéma. Au programme, un film indien excellent et très drôle. Les paysages sont magnifiques tout comme la musique et les chorégraphies. Un vrai moment de détente. Par contre pendant tout le film, de gros rats n'ont pas arrêté de courir dans les allées et sous les sièges. Impossible de mettre les pieds par terre sans que l'une de ces bestioles vienne renifler et chatouiller nos orteils. Il faut dire que sur l'île, ces rongeurs sont rois et vivent au grand jour. Ils sont sûrement beaucoup plus nombreux que les humains et donc, ils n'ont plus peur de se montrer. Nous les voyons partout tout le temps, dans les restaurants, les cuisines, au pied des poubelles, dans les caniveaux, sous les voitures, dans les pots de fleurs, sur les toits des maisons et ... dans les salles de cinéma.

    Le dimanche, en allant faire du vélo autour de l'île, nous croisons de très nombreux cyclistes. Nous parlons avec plusieurs d'entre eux et nous nous arrêtons avec un groupe attablé à la terrasse d'un café. En fait, ils nous expliquent que les cyclistes sont très nombreux par ici et que tous les dimanches, ils se regroupent et traversent le Nord de l'île jusqu'au parc naturel. Ils prennent le petit déjeuner ensembles tous les dimanches matin et ils font pression sur le gouvernement pour qu'il prenne en compte le déplacement à vélo. Cette route sur le littoral pourrait être très agréable pour les cyclistes si il y avait une vraie piste cyclable, car pour le moment la circulation est plutôt très dangereuse et dissuasive. Nous suivons le groupe qui nous invite à aller boire un jus dans la ferme des fruits, située à quelques kilomètres, au milieu de la forêt dans les hauteurs de l'île. Nous arrivons dans une ferme spécialisée dans les fruits exotiques et ô surprise, en conversion à l'agriculture biologique ! Pour ce dimanche matin, cela nous fait deux belles surprises. La ferme future Bio et les cyclistes écolos ! Il y a même un membre du groupe qui refuse de se déplacer autrement qu'à vélo. Il n'a ni voiture, ni moto. L'été prochain, un grand rassemblement organisé sur l'île devrait rassembler entre 3000 et 4000 cyclistes. Le but, continuer à faire pression en faveur du vélo comme mode de transport non polluant, conviviale et bon pour la santé.

    De retour à Georges Town, nous allons visiter le jardin botanique.
    Cédric : ''Quel potentiel ! Je me vois bien travailler là dedans. L'entretien laisse effectivement à désirer. Beaucoup d'énergie utilisée à tondre l'herbe sur de grands espaces à la manière d'un golf, alors que des arbres et des jardins japonais demanderaient de l'entretien et une rénovation sérieuse. Si je travaillais dans ce jardin, j'utiliserai des matériaux naturels pour faire les contours de certains massifs à la place des fers de béton armé utilisés actuellement. Pour moi, le travail commence à me manquer. Cela fait si longtemps que je n'ai pas eu un outil entre les mains.''

    Dans la maison du jardin botanique, nous rencontrons une femme formidable qui nous parle de la CAP (Consumers Association of Penang), l'association de consommateurs de Penang. Elle nous montre toute une série de livrets édités par l'association. Que ce soit sur les cosmétiques toxiques, l'alimentation, le vélo, les changements climatiques ... Tous ces petits guides sont clairs et assez engagés. On peut noter juste qu'il n'y a rien sur l'industrie du palmier à huile, ce qui est compréhensible puisque, si une voix s'élève contre un projet du gouvernement, ce dernier la fera taire rapidement de manière définitive. Nous avons bien compris, qu'ici en Malaisie, on ne doit surtout pas critiquer un projet du gouvernement. Même si à quelques kilomètres de la frontière thaïlandaise, en nous arrêtant boire un dernier jus de citron glacé, nous nous arrêtons dans une petite échoppe au bord de la route tenue par un vieux couple de malais. Ils sont gentils et très vite, après avoir discuté des vélos, du voyage et de la France, la conversation se tourne sur la Malaisie. Ashim le vieux musulman nous confie que d'après lui les vrais terroristes sur cette terre, ce sont les hommes politiques qui se permettent de détruire l'environnement de millions de familles qui vivaient grâce à la forêt. Ici par exemple, la route à été faite en 2001. En même temps tout à été déforesté et puis après replanté en hévéas et palmiers. Maintenant, ils vivent au bord du goudron et gagnent de quoi vivre en faisant à manger aux gens qui circulent entre la Thailande et la Malaisie.

    Derniers kilomètres avant la frontière, une publicité de monsieur Sime Darby qui fait aussi de la recherche génétique sur le maïs.

    Nous quittons la Malaisie avec la certitude de ne pas avoir fait ce détour pour rien. Nous avons vu de près la destruction de la planète et l'industrie qui en est responsable. Nous savons que des gens mauvais travaillent très dur pour le plus grand malheur de l'humanité. Mais nous avons également été témoins de la beauté de la planète; dans la mer bleue turquoise habitée par des poissons multicolores, des tortues tranquilles et des requins pacifiques; dans ce qui reste de la forêt primaire tropicale humide, avec ses espèces animales et végétales qui restent à découvrir et à aimer.


    ... et même si c'est dur, dans les prochains récits c'est promis, nous essaierons d'être plus positifs...

     

     


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  • Du 03 au 07 mai 2009 (381 km)

    Nous repartons de Kuala Lampur en espèrant voir des horizons plus paisibles et plaisants. Nous avons décidé de ne pas aller en Australie, non seulement parce que nous n'avons pas assez d'argent et de temps, mais aussi parce que toutes ces démarches modernes comme le visa électronique nous rebutent et que nous voulons garder une partie d'intimité. Nous avons un peu peur par exemple, de nous faire refouler à l'entrée d'un Mc Donald, parce que l'ordinateur a détecté notre passeport biomérique et que d'après les informations qu'ils ont, nous sommes plutôt des militants fervents défenseurs de la bonne bouffe et que par conséquent, par mesure de sécurité, nous ne sommes pas autorisés à rentrer dans un Mac Donald. De plus les frites grasses ne fourniraient pas l'apport énergétique approprié à nos besoins de cyclistes à vélo couché. Ceci est, bien sur, une fiction, car franchement, qu'est ce que vous voulez qu'on aille faire dans un Mc DO ? Pour le reste c'est très très près de la réalité.

    Nos chemins se séparent avec les cyclos-cool qui s'en vont vers Singapour, tandis que nous retournons vers la Thaïlande.

    Nous pensions avoir vu le pire avec les grandes zones déforestées et replantées en palmiers à huile au centre de la péninsule. Mais ici, à l'ouest du pays, c'est encore pire !!! Nous ne sortons jamais des palmeraies et nous nous faisons doubler toute la journée par de gros camions chargés de noix, direction la raffinerie. Sur les grands ponts au dessus des fleuves, l'altitude nous permet d'avoir une vue panoramique de la catastrophe. A 360 DEGRES, IL N'Y A QUE DU PALMIER A HUILE !!!! Aussi loin que notre regard puisse se porter, nous ne voyons qu'un océan vert et plat !!! Jamais notre moral n'a été aussi bas. Nous n'avons rien d'autre à faire que pleurer avec le sentiment d'être arrivés trop tard. Dans la petite ville de Sabak, nous rencontrons une chinoise, Malaisienne depuis plusieurs générations. Elle se fait appeler par son nom occidental, Catherine. Nous passons toute la soirée ensembles. Elle nous fait visiter son village et elle finit par nous parler de son environnement. Elle nous explique qu'il y a douze ans seulement, la forêt à été rasée, les arbres vendus, les routes tracées, les bâtiments de ville construits et les palmeraies plantées. Avant cela, elle vivait avec sa famille dans une petite maison, en bois, sur pilotis, dans la forêt primaire. Le seul moyen de locomotion qui existait était le bateau car les cours d'eau étaient les seules voies de communication. Nous lui faisons la remarque que maintenant, elle doit être contente de pouvoir se déplacer librement et d'avoir accès à tout ce qu'elle veut. Sa réponse est claire : ''c'est sûr que maintenant c'est beaucoup plus moderne, qu'il y a beaucoup plus de choses, de magasins, mais c'est aussi beaucoup plus pollué, moins beau et la nature à été détruite''. A la dernière question ''Ben alors, tu préfères avant ou maintenant ?'', Sans aucune hésitation et avec certitude, elle nous répond : ''je préfère avant bien sûr, mais il est trop tard''.

    Parfois au bord de la route, il y a le nom du propriétaire. Très souvent, c'est celui de Sime Darby qui revient. Nous apprenons par les journaux locaux et par nous même, que ce monsieur est un très très gros propriétaire de palmeraies. Il nous fait beaucoup penser à EDF et le nucléaire, ou bien à Total et toutes ces grosses entreprises qui dépensent beaucoup en publicité pour raconter des mensonges énormes aux gens. Si vous voulez un exemple très concret, nous en avons un beau.

    Sur un journal malaisien, il y a un gros dossier sur l'environnement et la crise climatique mondiale. Monsieur Sime Darby qui lave plus vert que les verts a payé une grosse page, pour mettre une publicité. L'image représente une Chouette Effraie en plein vol et le texte qui va avec pour résumer en français c'est : ''Chez nous, dans nos palmeraies, nous respectons la nature et nous cultivons avec les méthodes bio. Par exemple, pour réguler les rongeurs nuisibles des noix, nous avons installé des logements luxueux pour les prédateurs de ces rats ! ''

    Maintenant, dans un autre article paru quelques jours plus tard dans un autre journal, Monsieur Sime Darby est très content d'annoncer qu'il croit beaucoup en la recherche génétique sur le palmier à huile. Les nouveaux OGM ont un très bel avenir et il est très pressé d'en foutre partout !

    Conclusion : Monsieur Sime Darby va nous faire sur plusieurs milliers d'hectares du palmier à huile OGM BIO !!!! Bravo !!! alors là, on applaudit ce monsieur, s'il vous plait !!! Quel beau menteur !!! Quel criminel !!! (Au fait on vous a parlé des singes qui se sont réfugiés dans les palmeraies Sime Darby ? Et bien les pauvres macaques sont massacrés à coup de fusil !!! c'est Bio ça?).

    Le dernier jour avant de sauter sur l'ile de Penang où nous devons demander nos visas Thaïlandais, un journaliste d'origine pakistanaise nous arrête, intrigué par nos vélos, il veut faire un reportage. Cette fois ci, nous nous lâchons littéralement et sans dire du mal du gouvernement ou de Monsieur Sime Darby, nous lui faisons comprendre que pour nous, en tant que touristes, la Malaisie n'a plus d'intérêt car nous sommes venus pour voir la forêt vierge et au lieu de cela nous n'avons vu que du palmier à huile. Nous sommes déçus, vraiment très déçus et nous nous demandons comment font les gens pour vivre dans un tel environnement. En plus, nous sommes effarés par l'utilisation intensive de désherbants chimiques sous les jeunes palmiers. Des problèmes graves de pollution et de santé ne vont pas tarder à apparaître. Déjà, nous avons remarqué que les gens ne se déplacent jamais à pied ou en vélo et nous avons croisé beaucoup d'enfants obèses. Tous les déplacements s'effectuent en motos ou en voitures ce qui génère de la pollution et beaucoup d'accidents et de morts sur la route. Puis ces modes de transports rendent la culture du palmier à huile nécessaire pour pallier à la fin du pétrole.

     

     


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  • Du 26 avril au 2 mai (210 km)

    Après une journée passée à Jerantut afin de remettre à jour le blog et notamment tout le récit sur la Thaïlande, nous reprenons notre route au milieu d'infinies plantations de palmiers à huile. En soirée, nous arrivons dans la ville de Mantakab. Un journaliste nous prend en photo alors que nous sommes dégoulinants de sueur et complètement épuisés par la chaleur. Une journaliste chinoise ne tarde pas à apparaître et elle souhaite vivement une entrevue avec nous et nos étranges vélos. Dans une boutique de développement photo, elle nous pose des questions sur notre voyage. Nous sommes contents de lui répondre et surtout nous mettons vraiment l'accent sur ce que l'on ressent en pédalant au milieu des palmiers. Nous lui dressons le portrait de notre mode de vie et de nos valeurs, en insistant sur le fait qu'elles sont partagées par de plus en plus de citoyens de la planète, concernés par les changements climatiques et les atteintes à l'environnement. Elle prend bien notes de tout et nous signale au passage qu'elle travaille pour un journal diffusé dans la communauté chinoise de Thaïlande, Malaisie, Indonésie et Myanmar. Du coup nous espérons, que notre article, touchera un large public qui ne se sent, jusqu'à maintenant, pas très concerner par leur avenir et celui de la planète.

    Le soir nous allons faire un petit tour sur internet, dans un cyber-café immense avec plus de 100 PC, connectés à Internet avec des adolescents jouant tous au même jeu de guerre. Le boucan est infernal, on finit notre heure avec beaucoup de difficulté. Incroyable, pendant cette heure d'Internet, nous recevons plusieurs mails des cyclo-cools qui nous expliquent qu'ils sont sur la route vers Kuala Lampur et que ce soir ils sont dans un grand cyber café plein de gamins qui jouent à des jeux de guerre. Nous faisons le tour des ordinateurs mais, apparemment, ils sont ailleurs en ville. Nous leur renvoyons un message de rendez-vous sans savoir s'ils le liront. En allant manger au marché nocturne, nous croisons enfin le couple cyclo-cool. Nous nous donnons rendez-vous le lendemain matin à l'aube et c'est ainsi que nous pédalons ensemble jusqu'à Kuala Lampur, sur une route au milieu des ... palmiers, bien sur!

    Devinette : Qui a bien pu installer les immenses panneaux de publicité au bord des routes avec le slogan ''nous remettons du vert sur la Terre''?
    Réponse : évidemment ce sont ces enfoirées et criminelles sociétés de plantations de palmiers.

    Deuxième devinette : Sur notre route nous croisons une entreprise qui se nomme ''Environnement Forêt''. Qu'est ce qu'elle peut bien faire ? Quel est son business ?
    Réponse : c'est tout simplement une entreprise d'abattage. Elle ferait bien de revoir son nom. Quelque chose du genre ''environnement feu la forêt''.

    ''Cédric : L'étape du jour de notre arrivée à Kuala Lampur aurait pu être très agréable. Nous avons trouvé une route peu empruntée, serpentant, dans des petites montagnes encore boisées. Il y a des côtes difficiles mais quel plaisir de pouvoir respirer la verdure et pas les pots d'échappement. La matinée se passe pour le mieux jusqu'à ce que la chaîne de mon vélo casse !!! BBRRRRRHHHHH Casser la chaîne en pleine côte à 30 km de l'arrivée, en pleine cambrousse !!! Ce n'est pas très grave, je me dis que je vais pouvoir inaugurer mon nouveau dérive chaîne acheté en Thaïlande. A peine j'enlève le maillon cassé que c'est le dérive chaîne tout neuf qui casse !!! GGGRRRRRR !!!!!! LA JE CRAQUE et je m'emporte PUT.... DE VELO DE MER... CA ME FAIT CH... C'EST LA JE SAIS PAS COMBIENTIEME FOIS DEPUIS LA THAILANDE MAIS LA J'EN AI RAZ LE C..!!!!!!! Alice essaye de me calmer même si elle est d'accord sur le fait qu'on a que des soucis avec mon vélo. Au delà de l'usure normale des pièces, ce vélo a la poisse !!! Casse du support des tubes de la chaîne, casse du cadre sous le siège, usure hyper prématurée des gaines qui passent dans le cadre, le tube avant qui s'est mis à tourner alors qu'on était en Allemagne, les freins qui étaient pourris dès le début du voyage et qui ont définitivement cassé au Népal !!! Des fois, j'ai l'impression d'être parti faire le tour du monde sur un vélo de course tout léger. Est-ce qu'un vélo de supermarché vingt fois moins cher n'aurait pas été mieux ? Sérieusement, je me pose la question !

    Sur cette route où il n'y a personne, à part le soleil et nous, je médite, assis en tailleur au pied de ma carcasse de vélo et j'attends que l'insolation vienne. Soudain on entend un véhicule qui arrive. C'est un 4x4 avec deux mecs dedans. Alice arrête le véhicule et demande aux gars de me déposer quelque part ou je vais pouvoir demander de l'aide, en attendant, elle reste surveiller les vélos. 5 km plus loin, je retrouve Jean-Christian et Emilie qui s'étaient arrêtés demander leur chemin. Je leur emprunte leur dérive chaîne et j'explique la situation. De retour avec Alice, je recommence le travail, mais l'énervement me fait faire des erreurs, je tords le maillon. Ce n'est vraiment pas du boulot. Tant pis, ça tiendra le temps que ça tiendra. Toutefois, je préfère ne pas pédaler dans les côtes trop raides, pour éviter de recasser tout de suite. Alors je pousse le vélo sur une poignée de kilomètres, au moment le plus chaud de la journée. Dans la grande descente qui suit, mon frein arrière fait un bruit horrible et ne freine plus du tout car j'ai oublié de le dire, mais dans l'ascension du col précédent, une vibration m'a alerté et j'ai bien fait d'y regarder tout de suite car c'était l'étrier de mon frein arrière qui était complètement dé-serré. En pleine descente, le frottement sur quelques centaines de mètres a chauffé le disque et l'étrier, nous sommes obligés de nous arrêter et d'attendre que cela refroidisse avant d'y toucher. GGGRRRRRR !!!! Nous sommes complètement épuisés lorsque nous arrivons à Kuala Lampur. Pour économiser le bricolage de la chaîne qui ne va pas tenir longtemps, je me fais remorquer par Alice. Comme vous pouvez imaginer, c'est un peu dangereux avec le trafic de la capitale, mais c'est toujours mieux que de pousser le vélo. Au passage d'un tunnel sous une route, en remontant tout seul la petite côte qui suit, Alice qui est devant moi, aperçoit Emilie et Jean-Christian au loin. Elle part en trombe et moi, juste à ce moment, je casse la chaîne dont le maillon se prend dans le dérailleur avant, qui se tord et vient se poser sur le petit plateau. Un éclair déchire le ciel. Un coup de tonnerre suit et soudain : le déluge. Je me fais rincer comme il faut et je finis par rejoindre les autres qui ont réussi à se mettre à l'abri, avant que le ciel ne leur tombe sur la tête. Pendant une demie accalmie, je fais demi-tour sur 3OO mètres car nous avions cru voir un magasin de cycle. Effectivement, un vieux chinois vend des vélos. En deux coups de pinces dérive chaîne ''made in Japan'', il me remet la chaîne en ligne.''

    Notre séjour à Kuala Lampur dure 3 jours et c'est largement suffisant. Après le choc, devant les grandes tours, les paillettes, le luxe des grands shopping malls et le train aérien monorail, nous sommes vite lassés. Les deux plus grandes tours jumelles, symboles et fierté du pays, sont le siège social de Petronas ''pollution & co'', probablement la plus grosse industrie pétrolière du Sud Est asiatique. En allant faire un tour dans les immenses temples de la consommation, nous regrettons vite cette idée de sortie culturelle et quelle n'est pas notre angoisse chlostrophobique quand nous ne trouvons plus la sortie de cette immense bâtisse. Plus tard, en visitant une maison du chocolat, nous réalisons que c'est Pâques, alors pour nous remonter le moral, nous achetons ¼ de tablette (car c'est très cher) de chocolat blanc et noir, que nous dégustons tout de suite. Le maître chocolatier s'est formé en France.

    Nous partageons une chambre avec Emilie et Jean-Christian dans une guest house où le personnel est étrange et les clients plus que bruyants et irrespectueux. Nous n'aurons pas pu passer une nuit tranquille, à cause d'une bande de jeunes anglais et australiens se comportant insolemment, pire qu'une bande d'adolescents livrés à eux même. Nous avons même passé une nuit dans le couloir à attendre qu'ils se calment. Ils ont bu comme des trous et l'un d'eux, en pleine nuit, s'est amusé à voler un taxi et à rouler dans la ville alors qu'il était complètement bourré. Ce comportement en Malaisie pourrait le conduire à la prison, ce qui montre le degré d'intelligence de ce garçon et de ses compagnons. Il faut attendre 6h du matin pour voir la plupart de ces jeunes gens plier leur sac à dos et partir à l'aéroport, en laissant derrière eux, une guest-house en ruine et enfin calme. Ce qui nous énerve le plus, c'est de voir à quel point, les gérants ont été tolérants avec ces touristes venus du bout du monde, en avion, juste pour se bourrer la gueule et fumer, dans un pays musulman où l'alcool et la drogue sont plutôt réprimés sévèrement voire mortellement. Quand à nous et notre nuit blanche, aucun geste de compréhension de la part de la direction. Il faudra insister et insister et insister jusqu'à ce que notre harcèlement les fasse craquer et qu'il nous offre une nuit moitié prix. Ce qui en vérité n'est pas grand chose.

     

     


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  • du 23 au 25 avril 2008 (on ne pédale pas dans la forêt primaire)

    Alors voila, c'est décidé, nous allons faire un tour dans ce qui reste de la forêt primaire. Au début, c'est vrai, il a fallu nous convaincre d'aller dans cette destination à touristes, avec l'angoisse de nous voir contraint de suivre un circuit touristique bien balisé sur une portion de forêt bien aménagée.

    En fait, en arrivant à l'entrée principale du parc, nous constatons que l'hébergement est plutôt rudimentaire, pas cher, et les touristes ne semblent pas si nombreux. Peut-être que nous sommes en basse saison, ou peut-être qu'un site dédié à la forêt primaire n'est pas vraiment la priorité du gouvernement de Malaisie, clairement et ouvertement pro-palmiers et pro-déforestation.

    Pour aller dans le parc, nous devons traverser une petite rivière. Des bateaux à moteur se chargent de nous emmener moyennant une petite pièce. Une fois dans le parc, la première chose qui apparaît devant nous, ce n'est pas la maison du parc où nous devons retirer nos autorisations mais la réception d'un hôtel de luxe. Plus d'un hectare à été déboisé pour construire des maisons de bois individuelles climatisées, à destination des touristes plus fortunés. Sans autorisation donc, nous commençons à nous promener la première journée. Aucun gardien du parc ne viendra nous contrôler. Officiellement si quelqu'un est pris sans permis, il risque très gros, de même que si l'on jette un papier dans la forêt et que l'on est pris, on risque quelque chose comme 3000 euros d'amende. Le deuxième jour, nous partons à l'aube. Nous sommes les premiers à traverser la rivière et cette fois-ci nous prenons nos permis pour circuler dans le parc. 1 RM!!! C'est le prix que nous payons pour l'autorisation de circuler dans cet endroit unique !!! Plus précieux que tout l'or du monde, pour cette petite miette de ce qui était, il y a encore 20 ou 30 ans, une gigantesque forêt primaire, nous devons payer 20 centimes d'euros !!! C'est dire encore une fois la valeur de ce joyau aux yeux du gouvernement de Malaisie. Nous aurions préféré payer 10 euros afin de rémunérer correctement de vrais gardiens et de vrais projets de conservation et protection de la forêt primaire.

    Notre permis en poche, nous commençons à nous enfoncer dans ce paradis. Chaque pas, nous fait découvrir une nouvelle forme, un nouvel insecte, de nouvelles odeurs, des sons différents. Tous nos sens sont sollicités au maximum, nous regrettons même d'avoir des yeux si peu nombreux et des oreilles si petites. Dans ce paradis, il y fait toutefois très chaud et humide et puis il y a des moustiques, des sangsues, des épines, de grosses fourmis, des araignées, des serpents et tout un tas de locataires qui pourraient rebuter pas mal de personnes. Mais, à la vue de l'un de ces arbres gigantesques, on oublie tout et l'émotion reprend le dessus !!! Parfois, on s'imagine « Dieu » en train de semer la vie sur terre et on se dit qu'il n'était quand même pas très bon jardinier. « Dieu » devait être aussi un peu fainéant sur les bords et il a du être un peu fatigué de semer la vie sur terre, alors il a abandonné son sac de graines sur place et ça a donné cette forêt. Nous ne voyons pas d'autre explication justifiant une telle richesse biologique. A la mi-journée, alors que nous étions en pleine contemplation au milieu d'un sentier peu fréquenté. Nous nous faisons rattraper par deux randonneurs, les seuls Homo-sapiens que nous verrons de la journée. Ils sont toulousains d'origine et ils baroudent depuis de nombreuses années. Vraiment très sympas, nous discutons ensembles un bon moment. Ils sont complètement effarés par la vitesse à laquelle on détruit ces forêts. Ils connaissent bien ce coin de la planète pour s'y balader régulièrement depuis un bout de temps. Ils voient la progression du palmier à huile, les grands arbres qui disparaissent, les orangs-outans massacrés, le tourisme de masse qui se développe et bétonne les côtes et les îles du Sud-Est asiatique. Comme nous, ils voient le monde aller de mal en pis et leur vision de l'avenir est plutôt pessimiste. Alors ils viennent profiter de ce musée de la forêt primaire, peut-être le seul endroit où l'on peut encore observer des grands arbres. Ils nous expliquent, par exemple, que dans d'autres parcs naturels, il est autorisé de couper les plus grands arbres pour le « business » du bois. Notre moral continue à tomber en chute libre. Notre seul espoir, c'est d'écrire dans ce blog en espérant qu'en lisant ces lignes, vous puissiez être touchés et soudain conscient que le plus important, ce n'est pas la crise économique ou votre revenu mensuel mais que la vraie urgence c'est de lutter quotidiennement pour sauver ce qui reste de notre planète. Il y a tellement de chose possible à faire et, en France, tellement d'initiatives et d'associations ! Vous pouvez aider des paysans Bio, leur donner un coup de main. Vous pouvez vous organiser à plusieurs pour manger bio et local pour pas cher. Même sans parler de label Bio, mais trouver des paysans qui se revendiquent comme tels et pas des ''agro managers'' qui gèrent leurs champs par satellite.

    Jardinez !!! Même en ville, il y a moyen de faire pression sur les politiques pour récupérer des terrains. Pour les petits budgets, la solution n'est pas chez LIDL ou dans les rayons top budget d' Auchan, mais bien dans le jardin où les légumes ne coûtent rien !! Vous récupérer vos graines d'année en année, les échanger avec les voisins et amis, vous arrosez à l'eau de pluie, vous engraissez la terre avec votre compost. Tout cela ne vous coûte qu'un peu de temps. A la maison, vous pouvez réduire votre consommation d'électricité. Regardez dans vos tiroirs, combien d'objets électriques inutiles vous avez, à commencer par votre téléphone portable ou votre télé! Ensuite vous avez la possibilité de quitter votre fournisseur d'électricité nucléaire pour des fournisseurs d'électricité renouvelable. Et ne vous imaginez pas par exemple qu'en quittant EDF, vous allez faire couler l'entreprise et que l'entretien des centrales va diminuer et donc la sureté nucléaire avec. C'est déjà le cas! EDF reverse un maximum d'argent pour ses actionnaires et un minimum pour la sureté dans les centrales.

    Bref, revenons dans notre forêt où ce soir la projection d'un film de propagande nous a révoltés. Nous pensions regarder un film instructif nous apprenant un tas de chose sur les animaux et les plantes. En fait, il s'agissait d'un film publicitaire pour inciter les gens à venir dans ce parc, ce qui est idiot puisque ceux qui voient le film y sont déjà. Le pire, c'est bien la petite propagande pour le palmier à huile. Pas un mot sur les grands arbres mais par contre, l'éloge sur la diversité des espèces de palmiers à huile de cette forêt. Il y a aussi un clin d'oeil aux tribus qui vivent dans le parc. Le gouvernement malaisien, dans toute sa grandeur et son immense bonté, a autorisé les tribus indigènes à continuer de vivre de manière traditionnelle et à prélever dans la forêt le nécessaire à leur survie, malgré le fait que ce soit un parc national. Une attraction touristique consiste d'ailleurs à aller observer ses ''sauvages'' qui vivent dans la forêt.

    Le samedi, c'est le week-end pour les gens du pays. Ils viennent en nombre s'amuser dans ce qui reste de leur vie passée. La forêt primaire se transforme en parc d'attraction, où les gens courent partout, crient, cueillent des plantes ou grattent l'écorce de certains grands arbres sous prétexte qu'ils ont des vertus médicinales et que désormais, ils ont complètement tous disparus. Les anciens nous racontent qu'autrefois, ils allaient pêcher sur la rivière. L'eau était claire et transparente, ils lançaient leur filet lorsqu'ils voyaient les poissons. Maintenant avec la déforestation et les plantations de palmiers, la terre est mise à nue et la pluie a transformé la rivière. Désormais couleur café au lait, l'eau est devenue complètement opaque, plus personne n'oserait y nager. De plus le trafic de bateaux est incessant et les gens ont abandonné la tranquillité de la rame pour des moteurs à essence bruyants et polluants.

    Même si nous avons un gros coup de déprime, nous nous considérons comme extrêmement chanceux d'avoir pu voir et marcher au coeur de ce vestige du poumon de la planète, régulateur des climats. Nous sommes conscients que ce cadeau là n'est pas donné à tout le monde. Ce que nous avons éprouvé au pied de ces arbres, ou bien devant ces insectes ou ces fleurs restera gravé à jamais en nous.

     

     


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