• Du 14 au 21 juillet (103 km)

    Nous allons chercher Anne à l'aéroport et nous la ramenons sur le porte bagage, sous une pluie battante. Son sac est extrêmement lourd ! Nous lui faisons remarquer que nous l'avions prévenue, à plusieurs reprises, qu'il lui fallait prendre un minimum d'affaires! Et oui, lorsqu'il faut pédaler fort pour trainer des babioles inutiles, c'est assez déprimant et décourageant.

    Dans notre petite chambre, elle se met à déballer son sac qui est en fait rempli de tout un tas de produits délicieux de chez nous. Nous ne savons pas comment la remercier, ni si elle se rend compte elle même, de l'immense plaisir que cela nous procure ! Devant le saucisson sec, nous oublions que nous sommes devenus végétariens. Dans sa serviette de toilette et dans son étui de moustiquaire, elle nous sort une bouteille de Reuilly et une de Montbazillac. Le rouge accompagne à merveille la pyramide et la bûche de chèvre du Berry. Dans le sac de tisane Bio élaborée par Serge Guza (Phytobrenne), ça sent bon la campagne française. Il y a également de la confiture maison, de la pâte à tartiner à la noisette, du pain d'épices, des biscuits, du savon d'alep, etc.

    Tout le long de notre séjour à Ventiane, il y aura comme ça un doux parfum de la marche berrichonne.

    Avant de partir pour le baptème de l'aventure à vélo pour Anne, nous lui trouvons un vélo d'occasion. Une belle bicyclette bleue pour la grande blonde.

    Cédric : ''Et puis je refais faire chez un petit artisan, ma housse de siège de vélo qui était lambeaux. Une belle housse en skie de siège de moto, facile à nettoyer, séchage rapide et ne tâche pas mon dos. Cela va être plus agréable de pédaler maintenant. Même si j'ai du mal à atténuer le grincement stressant de l'aluminium cassé sous le siège, j'envisage de continuer le voyage sur cette monture.''


    Le 17 juillet au matin, nous plions nos sacoches et nous payons la chambre. Manque de bol, depuis la veille, il pleut. Pour une fois, ce n'est pas une simple averse. De toute manière, depuis qu'Anne est arrivée, il pleut plus que d'habitude, à croire qu'elle a rapporté la pluie dans ses valises. Elle aurait du sang normand que ça ne nous étonnerait même pas! Nous attendons que les nuages se vident et à 13h nous décollons. Enfin. Première étape de 32 km. On démarre doucement car Anne nous avoue qu'elle n'a fait un entraînement que de 16 kilomètres!
    Pour une première nuit, nous trouvons un genre de resort qui semble abandonné. Un gars nous fait visiter une chambre dans une cabane. Il y a des posters de pin-up sur les murs. On se doute que l'endroit doit être prisé des consommateurs de ''filles de joie''. Comme nous sommes blancs, le tarif augmente indubitablement. Nous prenons donc une chambre avec un lit immense pour 3. La nuit est très mauvaise. Le lit s'écroule à plusieurs reprises et nous finissons la tête en bas. Le resort qui semblait sans vie s'anime à la nuit tombée et se transforme en karaoké. Au petit matin, alors que nous commençons à peine à fermer l'oeil, des gars tapent à grands coups de marteau sur une tondeuse en bois. Nous repartons la tête dans le brouillard.

    Comme nous sommes assez pressés par nos jours de visas qui filent à tout allure, et que notre vitesse moyenne diminue au fur et à mesure que nous entrons dans les paysages montagneux du Nord du Laos, nous devons mettre les vélos sur un bus. Nous passons ainsi des cols qui nous auraient pris des journées entières.

    A Luang Prabang, Anne nous impose des vacances. Considérant que passer son temps à chercher où manger, préparer un itinéraire, chercher un endroit pour dormir etc, n'est pas de tout repos. En plus, à vouloir toujours économiser, nous avons mangé une soupe de nouille avec des herbes fraîches mal lavées. Effets secondaires radicales : Où sont les toilettes ? Nous restons donc deux jours à Luang Prabang, l'ancienne capitale du Laos. Avec des petits déjeuners à la française (café, thé, croissants, pains, beurre et confiture maison), puis des restaurants le soir, nous vivons complètement au dessus de nos moyens. La ville très jolie, à nos yeux en tout cas, parce que les vieilles demeures coloniales sont intactes et nous rappellent la France. Au milieu de ces maisons reconverties pour la plupart en hôtels ou en restaurants, il y a des temples plus ou moins vieux, pleins de bouddhas dorés et de bas reliefs de dragons. En plus, la ville est posée dans un décor montagneux splendide le long du Mékong. Nous rencontrons d'autres français avec qui nous passons de bons moments et notamment une soirée au resto en compagnie de Steph et Serge. La visite du marché nocturne nous fait bien rire et nous impressionne. On y vend une quantité astronomique d'objets artisanaux traditionnels du Laos, qu'on ne voit qu'ici. Par exemple, nous n'avons jamais vu les gens d'ici mettre des charantaises, pourtant, il y en a plein le marché. Et puis tous ces habits, on trouve les mêmes à Katmandou, Bangkok ou New Delhi. Ce qui est moins marrant, c'est de voir que les touristes adorent rapporter des bouteilles d'alcool avec des scorpions ou des serpents noyés dedans. La chasse de ces animaux pour ce commerce va finir par les éliminer définitivement. Il serait plus judicieux de mettre une espèce animale qui pullule à cause des hommes. Des blattes dans les bouteilles d'alcool, par exemple, ça ce serait bien. Et c'est Anne qui serait contente de voir les blattes dans des bouteilles plutôt que grimpées sur son dos quand elle dort !

    C'est d'ailleurs après une nuit à lutter contre ces bestioles venues dans son lit que nous reprenons la route vers le Vietnam, car mine de rien le temps passe très vite et nos visas sont bientôt terminés.

     

     


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  • Du 04 au 13 juillet (471 km)

    Le matin du troisième jour après la coupure du genou, nous constatons que la plaie est déjà bien cicatrisée. Nous décidons de ne pas perdre plus de temps car il faut que l'on soit à Ventiane, la capitale, un peu avant le 14 juillet, pour accueillir un morceau de notre Berry de départ en France, incarné dans la peau d'Anne, une amie clown.

    Le genou bien bandé, nous reprenons la route. La première journée se déroule sous un soleil franc et cuisant. Aucun souci avec le genou blessé. La deuxième journée, le relief est un peu plus marqué et au sommet d'une haute colline, un vent de tempête annonce le déluge. Le soleil a disparu depuis ce matin et nous nous sommes déjà pris une saucée entre deux villages. En vitesse nous nous réfugions dans un resto routier où la famille gérante est aussi souriante et agréable qu'une porte de prison. Le déluge commence. Jusqu'au fond du restaurant pourtant bien abrités nous sommes éclaboussés et le vent nous refroidit. Il nous arrive alors une chose incroyable que nous avions complètement oubliée : la sensation de froid, la chair de poule, les dents qui claquent. Nous sommes gelés. Au bout de 4h00 de pluie diluvienne (heureusement que nous nous sommes arrêtés sur les hauteurs pour ne pas être inondés), nous repartons sous un ciel qui essore ses dernières gouttes. Après 107 km, nous sommes épuisés et toujours trempés. Nous nous précipitons sur le premier et peut-être unique hôtel au bord de la route. Certaines de nos sacoches ont fini par prendre l'eau, notamment les habits et l'appareil photo. Nous ne faisons donc pas les difficiles du moment qu'il y ait un ventilateur pour sécher nos affaires. La chambre est quand même vraiment dégueulasse !!! Tout d'abord il y a les draps tachés qui ont déjà servi à accueillir une ou plusieurs prostituées. Les préservatifs séchés témoignent de la dernière utilité de cette chambre. Le pire étant le flot continu d'énormes blattes qui remonte dans la chambre par plusieurs trous dans la salle de bain. Le plus extraordinaire avec ces bestioles, c'est que même écrasées ou explosées à grand coup de sandale de vélo, elles peuvent continuer de vivre des heures voire des jours entiers ! En témoigne cette blatte que nous avions réduite en purée la veille et qui c'était traînée malgré tout sur plus d'un mètre pendant toute la nuit. Au petit matin elle bougeait encore !!! Comment fait-on pour tuer ces bêtes ?

    Au petit matin, nous repartons pour une étape théoriquement de moins de 70 km jusqu'à la ville de Savannakhet. En réalité nous faisons 82 kilomètres car les bornes sont complètement fausses dans ce pays. A chaque kilomètre, elles rajoutent entre 20 et 80 mètres, alors au bout du compte ça fait beaucoup. Heureusement que la route vallonnée est agréable. A Savannakhet nous nous reposons deux jours dans cette ville où les belles maisons coloniales sont toutes, plus où moins volontairement, non entretenues. On dirait que les gens souhaitent que ces traces du passé colonial français, s'effacent le plus vite possible. Dans les quartiers plus récents se dressent des maisons de style chinois moderne, en béton affreux, de forme carrée avec des décorations de mauvais goût et du mobilier en bois énorme gaspillant les derniers arbres de la forêt primaire.

    Dernier soir à Savannakhet, en nous baladant dans la ville, nous traversons le temple où il semblerait qu'il y ait une fête. Nous ne connaissons pas la raison de cet événement religieux mais nous constatons que beaucoup de fidèles sont venus acheter des petits bouquets de fleurs et de l'encens. Mais surtout, ils sont venus claquer leur argent dans des vieux jeux de hasard où il n'y a pas grand chose à gagner. Jeux de dés, de cartes ou vieux jeux d'adresse en carton fait maison. Tout le monde participe dans la joie et la bonne humeur.

    Le 8 juillet 2009, nous faisons ce qui s'appelle, une journée Bruno Saulet. En hommage à notre camarade cycliste avec qui nous avons voyagé de la Roumanie à l'Iran. Pour Bruno, une journée de 141 km serait quelque chose de banal, mais pour nous, c'est un exploit et même un record de distance, surtout que nous avons perdu du temps à jouer à cache-cache avec les orages !!! Il nous faudra une journée complète pour nous en remettre. Dans la ville où nous arrivons, à Thakhet, nous trouvons l'hôtel le moins cher mais aussi le plus crasseux. Nous y passons plusieurs nuits car nous sommes à coté du Khammouane, une région magnifique où des montagnes très découpées et couvertes de forêt, cachent grottes et cascades. Malheureusement pour nous, ce n'est pas la bonne saison pour visiter le coin et toutes nos tentatives d'exploration, en dehors de la route principale, se terminent par des bains de boue.

    Le dernier soir dans cet hôtel miteux, en entrant dans notre chambre, nous découvrons un fait anodin mais tout de même étrange. Les petites boulettes de scotch double face que nous avions décollées du mur, pour boucher deux petits trous dans la porte, étaient retombés sur le sol de notre chambre. Craignant d'être observés, nous rebouchons bien vite les trous avec deux morceaux d'autocollant. Dans la soirée, nos regards se portent par hasard sur la porte et QUE VOIT-ON ? Non nous ne rêvons pas !!! Les autocollants bougent, on dirait que quelqu'un les poussent depuis le couloir. Ce que nous n'avons pas encore expliqué, c'est que compte tenu de la chaleur permanente dans ce pays à cette période, nous sommes rarement habillés lorsque nous sommes enfermés dans notre chambre. Donc rapidement et sans faire de bruit nous nous habillons et nous dirigeons vers la porte. BLAMM !!! Nous ouvrons d'un coup sec : personne dans le couloir ! Nous n'avons pourtant pas rêvé, nous les avons bien vus bouger ces autocollants !!!

    Cédric : ''Quelques minutes plus tard, un pressentiment me fait dire qu'il vaudrait mieux nous habiller. Sans arrêter de parler comme si de rien était, je me dirige doucement vers la porte et l'ouvre violemment. Le garçon de l'hôtel, pris en flagrant délit, se relève et cherche ses mots: ''Désolé! » Qu'il me dit, « Il faudrait que vous alliez à la réception!'' Puis, un peu conscient que son argument ne tiendrait pas si j'allais voir la réception et leur demandais pourquoi ils veulent me voir, il me demande si nous n'avons pas vu deux jeunes garçons se balader dans le couloir. Je lui réponds que renfermés dans notre chambre, il est difficile de voir dans le couloir, par contre lui, du couloir, peut voir dans notre chambre. Extrêmement en colère, pour ne pas lui taper dessus, je lui claque la porte au nez. En lui promettant qu'il y aurait une explication demain.''

    Le matin de bonne heure, nous nous préparons pour repartir et bouclons nos sacoches sur les vélos. Au moment de payer, nous demandons à la jeune réceptionniste où est le garçon de l'hôtel ? Le « fumier », il est parti pour son jour de congé. Refusant de payer l'hôtel nous montrons à la fille les trous dans la porte. Nous la faisons regarder au travers et nous lui expliquons ce qui s'est passé. Elle n'en revient pas et reste très choquée, nous laissant partir sans payer. Ce n'est pas la première fois que nous voyons des petits trous dans les portes ou les murs des hôtels miteux du Laos. A l'avenir, nous serons plus prudents.

    Très en retard sur notre programme, nous n'avons plus le temps de rejoindre Ventiane en vélo, même en faisant deux jours de ''Bruno Saulet''. Nous profitons de ce qu'il y ait une station de bus, pour rattraper notre retard. Les vélos installés dans l'allée centrale, nous voilà partis pour Ventiane dans un bus qui roule à 10km/h de moyenne pendant les 10 premiers kilomètres. Puis d'un coup d'un seul, part en flèche, ne pouvant s'arrêter, sous peine de caler le moteur. Les arrêts sont fréquents au début du trajet, mais toujours de courtes durées. Juste le temps pour que le chauffeur et son équipage mangent, puis un autre arrêt pour charger 3 stères de bois dans les soutes et l'allée centrale. Les amortisseurs n'amortissant plus rien, le bus file à toute vitesse vers la capitale avec une réparation du moteur en cours de route, à coups de marteau au travers de la trappe à l'arrière du véhicule. Pendant le voyage, il n'y a qu'un accident mortel entre un 4x4 et un scooter (devinez qui est mort ?) qui fait ralentir notre chauffeur.

    Enfin, dans l'après-midi, nous sommes à Ventiane. Nous y sommes même en avance pour préparer l'arrivée de notre amie Anne. Il faut notamment qu'on lui trouve un vélo pour qu'elle puisse nous accompagner dans le Nord du pays. Cette tâche s'avère assez difficile car même si le Laos est soit disant un pays pauvre économiquement, se déplacer en vélo est devenu trop fatigant et carrément ringard. On trouve par contre sans difficulté, des revendeurs de petites motos. Ahhh ! Se déplacer en moto, devenir obèse, polluer l'air, faire du bruit, être dangereux et être en danger, mourir de maladies liées à l'immobilisme du corps et à la pollution si on ne meurt pas d'accident de la route... Ca, c'est la vraie classe !!! Reste à savoir combien de temps la planète va pouvoir supporter le bruit des moteurs et leur pot d'échappement.

     


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  • Du 28 juin au 3 juillet 2009 (139 km)

    A 150 mètres de la douane cambodgienne, une autre cabane en bois nous indique l'administration d'accueil du Laos. Dans sa guérite à peine plus grande qu'un frigo, le douanier est complètement gelé. Faut dire que la clim marche à fond. Et il n'est pas des plus sympathiques. Comme du coté cambodgien, il nous demande 1 dollar pour l'effort physique et l'encre usée pour tamponner nos passeports. Mais en plus, comme c'est dimanche et la fête de sa tante, il double les tarifs. Nous devons payer 4 dollars pour un soit disant droit de tampon qui n'est officiellement pas reconnu. Bref, 4 dollars dans la poche de l'apprenti esquimau dans sa guérite. Un minibus de touristes arrive. Ils payent chacun 2 dollars. Comme nous ne sommes pas pressés et que nous venons de faire 50 km, nous décidons de nous installer entre les deux douanes pour passer la nuit. Demain, c'est lundi et normalement, le tarif du bakshish sera repassé à la ''normale''. Nous commençons à nous installer sous les yeux éberlués du douanier et de ses collègues. Finalement, ils ne nous autorisent pas à rester ici cette nuit, ce à quoi nous leur répondons qu'il faudra traiter ce problème avec leurs collègues du Cambodge car dans cette zone, nous sommes exactement ni chez l'un, ni chez l'autre ou plutôt, les deux à la fois. Nous prenons le temps de manger notre casse-croûte et nous observons le travail des douaniers qui consiste, lorsqu'il n'y a pas de touristes, à jouer à la pétanque.

    Cédric : ''Pendant un moment, j'ai bien pensé prendre le douanier à la pétanque, en faisant le pari que si je gagne, il nous fasse passer sans payer, mais vu leur entraînement quotidien, je crois avoir bien fait de m'abstenir.''

    Finalement, devant notre détermination, l'un d'eux est venu nous voir et nous a demandé tout penaud: ''Et si vous payez 1 dollar, est-ce que vous partez maintenant ?''. Bien sûr, nous avons accepté car de toute manière, passer la nuit dans l'extrême chaleur moite de la tente sans même avoir pu nous laver ou nous rafraichir, aurait été une vraie torture. Un autre douanier est donc venu tamponner nos passeports, laissant son collègue oublier sa colère dans la bière et les boules de pétanque. Quel dur métier !

    OUUUUFFFF ! Enfin nous voici sur LA route du Laos. On dit LA route car il n'y en a pas tant que cela. Pendant presque toute notre traversée du pays, nous restons sur cette route n° 13 qui relie le Cambodge au Sud, à la Chine tout au Nord.

    Ce qui nous frappe dès les premiers kilomètres, à part le soleil, c'est le calme absolu qui règne ici. Les quelques humains qui vivent là, sont tous éparpillés dans les rizières. C'est l'époque du repiquage du riz alors tous le monde est au travail. Tout le monde sauf les buffles, qui se prélassent dans les mares boueuses au bord de la route. Les gens semblent plus tranquilles qu'au Cambodge et nous crient moins souvent dessus quand on passe. Chose très agréable aussi, quand les enfants nous saluent, ils disent « Sabaïdi » au lieu du HELLO qu'on ne supporte plus. Ca fait du bien de ne plus être considérés comme anglophones sous prétexte que l'on est étranger.

    Notre plus gros souci en entrant au Laos, c'est la monnaie. Nous n'en avons pas changé avant, hormis quelques billets récupérés des cyclocools en Malaisie. Une poignée de kips et quelques dollars ne suffisent pas pour 3 jours de vélo jusqu'à Paksé, la première ville. Bien que le site des 4000 îles sur le Mékong soit réputé pour être une place touristique incontournable, sans argent, nous ne pouvons pas nous aventurer là-bas.

    Le deuxième jour, au bout de 55 km, il ne nous reste plus d'argent et nous n'avons presque rien mangé. Nous négocions avec des habitants au bord de la route qui vendent quelques bricoles. Avec nos derniers billets, ils nous préparent une soupe de nouille chinoise. Dépités, nous restons à leur table sans être capable de décider quoi que ce soit. Il nous reste 80 km avant la ville, il fait une chaleur terrible et nous avons des restes de fatigues des 116 km de la veille. Nous pensons que jamais les gens voudrons nous nourrir et s'ils le faisaient, que mangerait-on ? Notre regard se porte sur les enfants qui chassent les grenouilles au lance-pierre, puis sur les deux petits cochons qui jouent sur la route. N'importe comment nous avons la certitude que nous ne mourrons pas ici, ce serait vraiment idiot. Et puis nous avons appris quelque chose pendant ce voyage, c'est que dans les moments un peu galère, il y a toujours un truc qui arrive, on ne sait d'où et qui nous sort de la mouise. Un genre de Dieu du voyageur, un St Christophe ou quelque chose dans le genre. Pour cette fois, nos saints sont une paire de chinois dans un pick-up. Faisant halte on ne sait pourquoi, précisément dans le bouiboui où nous sommes, les paysans leur expliquent notre situation. Ils nous proposent tout de suite de mettre les vélos dans leur véhicule car ils doivent retourner tout près de Paksé. Juste avant, ils doivent livrer quelques barils de fuel pour les tractopelles de leur entreprise chinoise qui travaille à l'enfouissement de la ligne électrique. En moins d'un quart d'heure, nous sommes dans le pick-up et 1h30 plus tard, ils nous déposent à 20 km de Paksé. Malgré la fatigue et le soleil qui tombe de l'autre coté du Mékong, nous faisons les kilomètres restants et en prime le tour de tous les hôtels pour trouver le meilleur et le moins cher.

    Alice : ''Notre séjour à Paksé se prolonge de 3 jours à cause d'un accident bête de Cédric. Il a laissé trainer l'outil multifonction sur le lit avec la lame ouverte et en montant sur le matelas, il n'a rien trouver de mieux que de s'entailler le genoux jusqu'à l'os !''

    Cédric : ''Ce que je ne ferais pas pour être au petit soin ! L'entaille est profonde mais heureusement juste à coté des ligaments et la lame est tombée sur un os donc il y a juste à ressouder les deux bords. Alice y parvient à merveille grâce aux petites bandelettes autocollantes. N'empêche que faire du vélo devient impossible car si je plie le genou, tout va s'ouvrir. Et puis avec la sueur, les bandelettes se décolleraient tout de suite. En attendant de savoir quoi faire avec mon genou, je profite de cet arrêt pour aller chez un jeune coiffeur qui refuse catégoriquement de me couper les cheveux. Lui demander de couper court, c'est comme lui demander de commettre un crime. Il me propose des coiffures de nouvelles stars thaïlandaises et je dois vraiment insister pour qu'il coupe franchement ma tignasse. Le pauvre jeune homme finit par craquer et en moins d'une minute trente seconde, il me ratiboise le ciboulot à la tondeuse. Le résultat est parfait et j'ai beau remercier le coiffeur, il n'arrive pas à s'en remettre.''

     


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  • du 24 au 28 juin 2009 (203 km)

    Nos derniers jours se passent tranquillement sur le vélo. Nous quittons Kratié un mercredi matin et nous pédalons 81 km sous une chaleur suffocante. Sur la petite route que nous empruntons, les gens sont relativement calmes et souriants. Les enfants nous saluent sans être hystériques, personne ne nous crie dessus, on se croirait déjà au Laos. Sur la route nationale, il n'y a presque personne et nous pouvons rouler cote à cote sans danger et dans un silence appréciable, nous discutons de tout et de rien. En fin de journée, nous traversons l'un des rares villages sur notre route. Inutile de chercher un hôtel, nous demandons l'hospitalité dans une Pagode. Comme nous l'avons appris, nous allons rencontrer le maître, puis nous le saluons à genoux les deux mains jointes et sans y aller par quatre chemins, nous demandons asile pour une nuit. En guise de réponse, un sourire difficile à interpréter et des éclats de rire moqueurs de la part des enfants autour de nous. Le moine allume une cigarette et s'en va caresser son chat noir. Puis il descend dans le parc et fait un tas de plastique au pied de la salle commune où nous sommes supposés dormir. Le moine dans son action purificatrice, allume un feu de plastique qui empoisonne tout le quartier. Comme il y a des enfants un peu nerveux qui tentent de faire rire leur public en se moquant ouvertement de nous, nous préférons repartir et prendre le risque de chercher un lieu plus paisible pour dormir. 300 mètres plus loin, un improbable restaurant de routiers nous offre une chambre avec moustiquaire. En plus du lit, nous avons la possibilité d'avoir de l'eau fraiche à volonté. Dans cette partie du Cambodge, il n'y a pas encore l'électricité, alors, lorsque la nuit tombe et que les clients arrivent. Les propriétaires du resto allument un vieux groupe électrogene issu d'un moteur de camion et tout de suite, les enfants se ruent autour de la télé.

    La nuit est très chaude et très courte car sous la moustiquaire il n'y a pas de vent et puis dehors des hommes essaient de réparer un camion jusqu'à plus de minuit en tapant sur de la ferraille, puis à 5 heure du matin, le père de famille allume sa radio pour écouter les nouvelles du pays. Cela nous donne l'occasion de partir de bonne heure avant qu'il ne fasse trop chaud car au bord de cette route il n'y a plus un centimètre carré d'ombre. La forêt à été exploitée, puis brulée pour laisser place aux cultures. Il ne reste de la jungle que quelques troncs noir de charbon. En fin de matinée, nous avons avancé de 72 km et nous arrivons à Stun Treng, la dernière ville du Cambodge. En cherchant un endroit où manger et puis dormir, nous passons devant un restaurant comme les autres. 5 minutes plus tard, nous entrons dans un hôtel demander les prix. La jeune chinoise nous fait visiter une chambre à l'étage et une femme de ménage nous appelle pour regarder par la fenêtre coté rue. Derrière quelques maisons, un énorme nuage de fumée s'élève et en quelques secondes des flammes géantes englobent des habitations. Comme le vent vient dans notre direction, par sécurité, nous préférons quitter l'hôtel jusqu'à ce que l'incendie soit maitrisé. Le petit restaurant tranquille que nous avions vu 5 minutes auparavant n'est maintenant plus qu'un gigantesque brasier. Le feu s'étend sur les maisons voisines et personne ne bouge. Toute la ville s'est réunie sur la place pour assister au spectacle, de veritables badaux. Il y a suffisamment de monde pour réaliser plusieurs chaînes humaines jusqu'au Mékong et passer des seaux d'eau. Il y aussi de gros tas de sable sur la place. Nous proposons à des spectateurs autour de nous d'agir pour venir en aide au seul et unique petit camion citerne des pompiers. Celui-ci ne maîtrise rien du tout tant il peine à se frayer un chemin au milieu de la foule pour aller se remplir dans l'eau du fleuve. En fin de journée, un gros tas de charbon encore incandescent forme un gros trou au milieu de la ville. Il n'y a pas loin d'une dizaine de modestes habitations en bois qui ont disparu, mettant à la rue on ne sait combien de personnes.

    Nous restons une journée supplémentaire à Stung Treng afin de sortir du Cambodge le dernier jour de notre visa. Nous en profitons pour aller faire un petit tour dans le grand marché couvert sur la place. C'est assez impressionnant de circuler au milieu de tout ce bric à brac. Tout est très serré et les allées sont super étroites. Nous passons des étalages de vêtements à la quincaillerie, puis à la vaisselle, aux téléphones portables et enfin à l'épicerie, aux gros sacs de thé, d'épices, de sucre et de riz. C'est au milieu du marché que nous attend la plus grosse surprise. Il y a la viande posée là, comme ça sur des planches ou à même le sol. Pour chasser les mouches des pieds de cochons, des têtes de chèvres, entrailles de veaux, et autres pattes de poulets confites, les jeunes vendeuses ont toutes tendu un hamac au dessus de la bidoche et elles se balancent tranquillement en attendant les clients. C'est vraiment une drôle de façon de chasser les mouches.

    Le 28 juin, nous quittons Stung Treng pour rejoindre le Laos. Les 50 derniers kilomètres de route cambodgienne sont agréables. Nous sommes seuls. Pas de voitures à part un mini bus qui emmène une poignée de touristes à la frontière. Enfin nous voici à la douane. Comme nous l'avions prévu, les policiers corrompus nous raquettent 1 dollar par coup de tampon sur le passeport. Nous payons sans broncher, fatigués de réclamer justice à chaque fois. Nous laissons les douaniers dans leur cabane en bois, jouir avec les quelques dollars qu'ils viennent d'empocher et nous allons affronter les mêmes hommes en képi du coté du Laos.

     


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